TW : agression sexuelle. Le témoignage qui va suivre a été porté à la connaissance du groupe de travail d’A2C chargé de la gestion des violences sexistes et sexuelles au sein du collectif.
Les Cahiers d’A2C #12 – Mars 2024
Ce témoignage, relatant une agression sexuelle du point de vue de la victime, a été proposé à la lecture, avec l’accord de son autrice, par le groupe de travail VSS lors du dernier week-end national, en vue d’un travail sur la prévention. Un deuxième texte, écrit par une personne ayant participé à la même soirée, était aussi proposé pour comprendre les mécanismes ayant empêché la réaction des présent·es. L’objectif était de réfléchir ensemble à une prise en charge et une responsabilisation collective du consentement. Pour ce faire, le groupe de travail avait préparé une série de questions qui nous a été donnée avant la lecture du texte : À partir de quel moment, peut-on parler d’agression sexuelle ? Dans le texte ? Comment être sûr·e que les limites sont franchies, que le consentement n’est pas respecté ? Pour la personne potentiellement agressée ? Pour la personne potentiellement agresseuse ? Pour les éventuel·les témoins ? Qu’est-ce que le consentement pour toi ? Comment s’y prend un agresseur pour arriver à ses fins ? L’agresseur est-il toujours conscient de ce qu’il fait ? Si oui, qu’est-ce qui le montre ? Quels sont les obstacles qui peuvent empêcher de réagir ? Pour la personne qui subit l’agression ? Pour celleux qui pourraient intervenir ?
Ces questions ont été travaillées en petits groupes mixtes, donnant lieu, par la suite, à une restitution collective, à une discussion et à une tentative de propositions concrètes.
Récit d’une rencontre comme beaucoup d’autres
Aujourd’hui, après quelques jours à prendre du recul et à me soigner, je t’écris une lettre pour te raconter cette soirée où l’on s’est rencontré·es. Oui, tu étais avec moi pendant les moments que je vais décrire, mais j’avais si peu d’importance pour toi que je me permets de te raconter tout de même car je suis persuadée que l’on n’a partagé que très peu de choses pendant ces moments où l’on était « ensemble ».
Pour te poser le contexte de mon côté (le tiens je ne le connais pas et il t’appartient), cette soirée était très importante pour moi. Elle coïncidait avec la fin de mes études, j’avais très envie de faire la fête et j’attendais avec impatience ce moment de détente chez mes ami·es. Je sais qu’avec elleux je suis en sécurité et entourée de personnes bienveillantes, de confiance, qui sont là pour passer un bon moment dans le respect de chacun·e.
C’est donc avec l’esprit léger que j’ai discuté, bu et dansé autour du brasero. J’ai tout aimé, la musique, les rencontres, les gens… et surtout la danse. Ça faisait si longtemps que je n’avais pas pu libérer mon corps sur de la musique ! Je n’avais pas envie de m’arrêter. Il se faisait tard et les gens partaient petit à petit, les danseur·euses se faisaient de moins en moins nombreuxes… et tu étais parmi les dernier·es. Tu dansais si bien et tu étais beau. Je me suis rapprochée pour partager ce moment avec toi. On a dansé tous les deux et c’était bon de retrouver ces sensations de connexion et de liberté. De flirt un peu aussi, je ne vais pas nier que j’ai pris du plaisir à jouer et à danser entre tes bras, à t’échapper puis à te revenir au gré de la musique. Pendant un instant, j’étais sur un nuage de bien-être et de bonheur.
Mais très vite, trop vite, j’ai compris que j’étais « allée trop loin ». Que je n’allais pas pouvoir redescendre de mon nuage sans y laisser quelques plumes. Je lisais dans ton regard, dans tes gestes, dans tes mains que tu avais envie de plus. Tu avais envie de moi, d’une manière ou d’une autre. Et ma liberté s’est effacée. Elle a disparu. Je ne pouvais plus partir, nous étions les deux seul·es à danser désormais. La musique avait été baissée et était juste suffisante pour nous deux. Les autres étaient rentré·es et, ne voulant pas déranger cet instant d’intimité, iels avaient refermé la porte en me glissant qu’iels nous attendaient à l’intérieur.
Je n’ai pas eu le réflexe de capter un regard, de demander de l’aide. J’avais encore l’impression puisque je m’étais fourrée dans cette situation toute seule, que je devais assumer et que je pouvais m’en sortir toute seule. Alors j’ai pris mon mal en patience, en espérant trouver rapidement une porte de sortie pour rejoindre mes ami·es et rentrer chez moi après une bonne soirée.
Et tu continuais à danser, en me tenant contre toi. Je n’avais plus le loisir de m’échapper pour quelques pas comme je le faisais plus tôt. Tu ne me lâchais plus, une main dans mon dos et l’autre qui gérait les musiques sur le téléphone. Ton front collé au mien appelait à un baiser, je détournais la tête faisant semblant de ne pas comprendre. Pourtant les signes étaient de plus en plus clairs, et je ne voyais pas comment mettre fin à ce moment sans te blesser. Après tout c’est moi qui avais entamé cette danse, c’est moi qui avais envoyé des signaux que tu avais interprété comme une invitation. Je n’allais pas, en plus de te décevoir, te blesser en mettant brusquement fin à ce moment. Une voix dans ma tête, celle qui se souvenait de la notion de consentement, me rappelait que je ne te devais rien. Mais d’autres voix, celles intégrées depuis toute petite, celles du jugement et de la culture du viol, me retenaient. Et puis toi aussi tu me retenais. À la fin de chaque musique, ta main se faisait plus ferme dans mon dos tandis que tu choisissais la chanson suivante.
Finalement je me suis résignée, tu avais tellement envie de passer un moment avec moi, ça ne me coûtait pas grand-chose de te l’accorder, si ? Et puis il serait toujours temps de partir quand tu en aurais marre. En plus j’avais plutôt de la chance, tu étais beau, tu dansais bien et tu étais sympa… j’aurais pu plus mal tomber non ? J’ai cédé à tes lèvres et je t’ai embrassé. J’avais la bouche sèche d’avoir beaucoup dansé et beaucoup bu. Ce n’était pas très agréable. Mais tu revenais vers moi et je me laissais faire, répondant même à tes baisers du mieux que je pouvais.
Quand je me suis finalement extraite de tes bras en direction de l’intérieur, tu m’as supplié de passer encore un moment seul·es. On pouvait s’asseoir sur le canapé, à deux on aurait moins froid. J’ai accepté en te prévenant que je ne restais pas longtemps. Tu as voulu t’allonger, j’ai refusé, alors je me suis assise contre toi. Je t’ai prévenu que je ne voulais rien faire de plus que t’embrasser, tu as accueilli cette nouvelle avec résignation mais tu m’as rassurée en me disant que tu savais bien que « Non c’est non ». J’étais heureuse de te l’entendre dire. Tes mains se promenaient sur moi, sur ma taille et mes bras, rien de plus que pendant la danse en soi… Je n’ai rien dit, mais je ne t’ai pas rendu la pareille. Quitte à être là tous les deux, j’ai cherché à discuter, à te connaître. Tes mains se faisaient de plus en plus audacieuses. Je me crispais et riais un peu nerveusement. Je t’ai dit non, pas maintenant. « Alors quand ? » Je ne savais pas, plus tard, à Paris ? On a échangé nos numéros. Mais tu n’en avais pas fini avec moi. J’ai tenté d’affirmer que je rentrais, que j’avais froid. Mais tu m’as retenue en me proposant de nous rapprocher pour avoir plus chaud. Tes mains se promenaient toujours sur moi et je devais régulièrement te rappeler ma limite ultime : pas sous ma jupe. Ca te faisait sourire que je ne cède pas, tu répétais mes mots avec attendrissement.
« Pas ce soir, pas sous ma jupe, non. » Je m’accrochais à ces mots, à cette limite. Je gardais en réserve deux arguments que même moi je savais ne pas pouvoir réfuter : j’avais froid et j’avais mes règles. Une part de mon esprit se raccrochait à la certitude que même si je pouvais céder sur beaucoup de points, ceux-là je ne pouvais pas les ignorer. Tu insistais pour me toucher plus, alors je t’ai proposé de remettre ça à plus tard, un autre jour… Tu me demandais où je dormais, si je ne voulais pas t’inviter. « Juste pour dormir hein ! » J’essayais de te dissuader, de refuser poliment « Oui mais tu es tellement belle tu comprends ». Je devais te rappeler à l’ordre de plus en plus souvent et tes mains prenaient de plus en plus de liberté.
J’essayais de me lever pour aller retrouver les autres, à l’intérieur. « Ils dorment tous » tu me disais, « reste avec moi, il n’y a plus personne là-bas ». Tes mains me rasseyaient sur le canapé, puis sur toi. Tu es passé sous mon tee-shirt, tu as caressé mes seins. Je ne sentais plus rien. C’était comme t’embrasser, ça n’était pas agréable, c’était mécanique et trop sec. Je me souviens m’être réjouie que mon collant ait glissé pendant la soirée. Tes mains me caressaient sous ma jupe maintenant, entre mes jambes, mais heureusement mon collant les maintenait éloignées de mon entrejambe. J’espérais que tu ne te rendes pas compte de la supercherie et que tu te contentes de ça.
Tu as dû percevoir que je n’étais pas réactive à tes caresses car tu m’as demandé de te dire que je te kiffais, que j’étais bien avec toi. Tu m’as expliqué que tu m’aimais car tu ne pouvais pas embrasser quelqu’un si tu ne l’aimais pas. Je répétais à contre cœur ce que tu me demandais. Après tout, si ça pouvait te satisfaire et te contenter… Tu as ensuite voulu que je te caresse à mon tour, pour te montrer que je te kiffais aussi. J’ai fait de mon mieux mais j’étais tétanisée, j’avais froid et sommeil. Je n’entendais plus de bruits dans la maison depuis quelques temps et je commençais à paniquer en me demandant comment j’allais pouvoir rentrer chez moi, à deux pas d’ici, sans que tu me suives. Tu étais de plus en plus insistant pour qu’on dorme ensemble, chez moi ou avec toi, peu importe où. J’ai expliqué que j’étais trop fatiguée pour dormir ailleurs que dans mon lit, que c’était la maison de mes parents et que je ne pouvais pas te ramener. Tu as compris que ça n’était pas possible alors tu m’as plutôt proposé de rentrer avec toi. C’était à dix minutes, vraiment pas loin.
Je ne sais pas combien de temps a duré ce dialogue de sourds, entre tes mains et mes rappels à l’ordre, tes questions et mes arguments, mes faibles tentatives pour partir et tes bras qui me retenaient sur toi. Je ne me souviens plus comment j’ai fait pour finalement me lever. Je pense que j’avais vraiment froid, que je tremblais et que je commençais à claquer des dents. Ça m’a donné la force de m’extirper du canapé et je suis rentrée dans la maison. Je ne sais pas à quoi je ressemblais, mais je m’imagine chancelante et grelottante. Heureusement deux copines étaient encore en train de discuter, je m’en suis voulu de les interrompre. J’ai du dire quelques mots, comme quoi tout allait bien mais que je voulais rentrer et que je n’étais pas sûre que tu me laisses partir comme ça. Elles m’ont posé quelques questions, j’ai compris qu’elles avaient compris que je venais de passer un mauvais moment. Tu es rentré dans la pièce et je me suis sauvée accompagnée par mes amies qui te parlaient pour détourner ton attention.
Je suis finalement rentrée chez moi, et je n’ai pas beaucoup dormi cette nuit-là.
Le matin j’ai vu que tu m’avais envoyé la localisation du bus qui te ramenait à Paris en partant. Je n’ai pas répondu. J’ai imaginé que peut-être tu voulais que je vienne t’embrasser une dernière fois avant que tu repartes. Ca aurait été très romantique si j’en avais eu envie… mais je n’ai pas répondu.
Puis tu as proposé qu’on s’appelle. Je n’avais pas envie mais les voix dans ma tête m’expliquaient que ça ne serait pas correct de ne pas donner suite après ces moments passés ensemble. Après tout je t’avais laissé m’embrasser, je t’avais donné mon numéro et j’avais même proposé qu’on se revoie. C’était normal que tu cherches à garder le contact. Je t’ai donc appelé et au début j’ai été contente de t’entendre. Tu étais toujours sympa et ta voix était douce. Puis tu m’as demandé quand je revenais à Paris, la semaine prochaine ? Je pourrais aller chez toi, vous faites toujours des fêtes et je pourrais rester dormir. Tu étais triste qu’on n’ait pas pu faire l’amour la veille, mais après tout « Non c’est non » n’est-ce pas ? Tu t’es aussi étonné que mes copines t’aient empêché de me raccompagner chez moi, comme tu aurais voulu le faire. Pas grave, ce sera donc pour la prochaine fois. Ça pouvait aussi être chez moi si besoin, si je préférais.
J’étais comme étourdie par toutes ces propositions et ces mots. J’acquiesçais à tout, estomaquée de me retrouver dans une relation de couple en à peine 24h et quelques bisous échangés à contre cœur. Comme je ne disais rien, tu me demandais de relancer la conversation, de te poser des questions… Mais je ne trouvais rien à dire. Une part de moi était en train de se résigner à être en couple avec toi. Après tout j’avais envoyé les mauvais signaux, non ? Je t’avais embrassé, je t’avais donné mon numéro et c’était même moi qui t’avais appelé ! Normal que tu t’imagines des choses. Tout ce qu’il me restait à faire c’était de sortir avec toi quelque temps avant de couper les ponts pour une raison ou une autre… Je pensais ne plus jamais me trouver dans ce genre de situation, que je ne connais que trop bien, mais il semblait que je me sois encore faite avoir.
Heureusement pour la suite, j’ai discuté avec ma sœur et plus tard une copine à qui j’avais demandé de l’aide pour quitter la soirée est même venue prendre de mes nouvelles. Raconter ce qu’il s’était passé m’a permis de prendre du recul et de chasser ces voix de ma tête. Cela m’a permis de me sentir légitime à te dire non et à ne pas céder.
Pendant presque deux jours je ne t’ai pas donné signe de vie, tu m’as quand même envoyé un message en me demandant des photos de moi, plein de photos. Je n’ai pas répondu.
Je t’ai finalement envoyé un long message, pas aussi clair et ferme que j’aurais voulu mais en te disant que je n’avais pas envie d’être en couple avec toi et que je voulais bien t’appeler pour en discuter. J’aurais aimé te dire comment je m’étais sentie à la soirée, que ça n’était pas possible, pas correct, que tu n’avais pas fait attention à moi mais uniquement à toi-même ; mais les voix dans ma tête avaient la vie dure et elles me laissaient entendre que si je le disais, tu n’allais pas l’accepter et que la faute se retournerait contre moi. Tu as répondu très gentiment, en me disant que tu comprenais et que tu voulais bien qu’on s’appelle bientôt.
Entre temps j’ai pu continuer d’en parler avec mes amies et petit à petit les souvenirs de mes sensations me revenaient. Tes mains sur mon corps, qui était comme anesthésié. Ta langue dans ma bouche. Ta main si près de mon entre-jambe, bloquée par mon collant.
J’ai finalement trouvé le courage de t’appeler, mais encore une fois j’ai été trop laxiste et trop gentille. J’avais fait une liste des points à aborder. Je n’en ai abordé que deux, tu en as balayé un en disant que j’avais mal compris, que ça ne c’était pas passé comme ça. J’ai laissé faire et je me suis concentrée sur le deuxième. Le fait que tu ne m’avais pas laissée rentrer alors que j’avais dit plusieurs fois que j’allais y aller. Là, tu as reconnu que c’était mal. D’ailleurs c’est tellement mal que tu en avais parlé à une amie à toi en lui disant que tu n’étais pas fier de ton comportement. Après t’être excusé en plaisantant, tu m’as demandé de te pardonner. Comme j’hésitais un peu, tu m’as demandé de répéter « Allez, dis-le, je te pardonne, c’est pas grave ». Alors j’ai répété du bout des lèvres, avec une boule qui grandissait dans mon ventre. Et puis « tu comprends, tu étais tellement belle que je ne pouvais pas te laisser partir… »
Alors non, non je ne comprends pas. Je suis en colère et je suis choquée. Choquée de mes propres réactions, de mes pensées et de la facilité avec laquelle je me suis résignée devant ta négation de mon importance et de mon consentement. Choquée de comment tu m’as enfermée dans un schéma que l’on connait toustes trop bien, un schéma qui est banalisé dans notre société de la culture du viol. Choquée de ce qui aurait pu se passer s’il n’avait pas fait dix degrés seulement cette nuit-là et si je n’avais pas eu mes règles. Choquée de me rendre compte que je fais passer la satisfaction et l’amour propre d’un homme que je ne connais pas avant ma propre intégrité physique et mentale. Je suis aussi choquée de la honte que je ressens, moi qui suis une féministe convaincue, très au fait des « je te crois » et « ce n’est pas toi, c’est lui » et « tu n’y es pour rien ». Moi qui théoriquement connais tous ces messages, je ne suis pas capable de les appliquer à ma propre situation, de faire taire cette culture du viol si profondément ancrée dans ma tête, de faire taire ce jugement de la société que l’on entend partout… Après tout, je l’avais bien cherché non ?
Heureusement je suis aussi soulagée de voir que toutes les personnes avec qui j’en ai parlé on bien accueilli mon histoire, n’ont pas remis en cause mon ressenti, voire m’ont encouragée à accepter que ça n’était pas normal. Je suis soulagée de voir que je ne suis pas seule et que, grâce à ces personnes merveilleuses, je vais réussir à te confronter pour te dire ce que j’ai vraiment ressenti sans me sentir obligée de minimiser pour ne pas te blesser.
Tu es conscient de ce que tu as fait et tu n’avais pas à le faire. Tu m’as niée et considérée comme une chose qui n’avait pas son mot à dire, ce qui arrive beaucoup trop souvent dans la vie des femmes et des personnes sexisées. Et cet énième épisode de ce type dans ma vie m’auras permis de prendre du recul et je vais tout faire pour qu’il soit le dernier. J’espère que de ton côté aussi tu vas te remettre en question et que plus jamais tu ne profiteras de cette emprise que la société te confère sur les filles.
Anonyme
La clarté du récit que vous venez de lire et les détails introspectifs qu’il offre ont permis des échanges très riches lors du dernier week-end national d’A2C.
La discussion a eu lieu en mixité, ce qui n’était pas évident, puisque aussi intime que semble être ce récit, il résonne comme une expérience commune chez de nombreux·ses camarades, instaurant une défiance légitime à voir ce récit discuté et interprété, même en vue d’une réflexion autour de la recherche collective de solutions. Néanmoins, l’ensemble des camarades se sont entendu·es sur le fait que la mixité semblait indispensable et nécessaire pour se donner les moyens d’une vigilance active et collective. En effet, il s’agissait par ce travail que la responsabilité n’incombe pas seulement à chaque individu — responsabilisant alors la victime ou les femmes — mais qu’elle se meut en une prise en charge collective. Nous avons établi que pour qu’une vigilance soit collective, il faut qu’elle devienne banale. Nous devons donc, régulièrement, prendre l’habitude de veiller à ce que tout se passe bien et à interroger, même sans aucun signe apparent, nos camarades pour vérifier que rien ne les importune, que les interactions dans lesquelles iels se trouvent, leurs conviennent. Réussir à désacraliser le non, pour réussir à le dire et pour réussir à l’entendre. D’autre part, nous avons proposé le violentomètre sur lequel nous travaillons, un violentomère spécifique pour les milieux militants où ce sont les hommes qui doivent prendre en charge leurs comportements, où ce sont eux qui en ont la responsabilité, sachant que nous pouvons aussi nous y référer pour indiquer à un camarade que son comportement n’est pas approprié. Vous pourrez retrouver ce violentomètre sur la version en ligne de l’article.
Il s’agit d’un début de travail que l’on sait insuffisant. Nous continuons donc en ce sens, afin de progresser en terme de prévention et vers une prise en charge collective. N’hésitez pas à nous écrire pour nous faire vos retours et propositions. Nous espérons que ce témoignage et cette amorce de réflexion puisse servir à d’autres collectifs, groupes ou individus.