Résistance des femmes palestiniennes : de la Grande révolte à la première Intifada (1936-1993)

Article originel écrit par Jane Hardy and Katie Coles, parus dans le n°184 de la revue International socialism, disponible ici : https://isj.org.uk/palestinian-womens-resistance/


Au Moyen-Orient, il existe une forte tradition de résistance et d’activisme des femmes contre l’impérialisme depuis plus d’un siècle1. En Palestine et dans la diaspora palestinienne, cette résistance contre les oppresseurs coloniaux s’est d’abord opposée aux Britanniques, puis à l’État israélien. Par le biais de leurs projets coloniaux, et surtout en soutenant l’occupation et la répression de la Palestine, ces oppresseurs ont cherché à imposer une version sioniste de l’histoire et à déformer et supprimer celle du peuple palestinien2. Dans une plus grande mesure encore, le rôle des femmes et leur résistance dans la lutte nationale ont été expurgés du récit historique. Leur histoire a été cachée – parfois non enregistrée, parfois détruite et au mieux mal reconnue3. La pensée orientaliste, un courant de certains mouvements « féministes » des pays impérialistes, a dépeint les femmes palestiniennes comme manquant d’agentivité et étant « les victimes silencieuses de l’oppression religieuse, patriarcale et culturelle, comme manquant de contrôle sur elles-mêmes et sur leur corps » et ayant besoin d’être secourues4. Pourtant, malgré cette rhétorique décrivant les femmes palestiniennes comme des spectatrices passives, dont le rôle dans la résistance était invisibilisé ou marginalisé, elles ont été des résistantes de la lutte palestinienne à travers l’histoire, souvent en première ligne.

Cet article explore la manière dont l’activisme des femmes palestiniennes dans le mouvement de libération nationale est lié à la lutte contre leur oppression – une histoire d’activisme et de rébellion qui peut être retracée depuis les années 1920 et avant. Nous nous concentrons sur trois moments forts de la résistance des femmes palestiniennes : la « Grande Révolte » de 1936 à 1939, lorsque les Palestinien·ne·s se sont soulevé·e·s contre les occupants britanniques ; la fin des années 1960, avec un tournant vers la lutte armée et le féminisme ; et la Première Intifada de 1987 à 1993, lorsque les femmes d’en bas ont pris la tête de la lutte contre l’occupation israélienne. Un second article, qui paraîtra dans un prochain numéro de ce journal, couvrira la période à partir de 1993.

La naissance de l’activisme des femmes : 1920-1936

L’émergence du mouvement des femmes en Palestine prend place dans le contexte plus large du découpage impérialiste du Moyen-Orient au lendemain de la Première Guerre mondiale. Anticipant l’effondrement de l’Empire ottoman, la France et la Grande-Bretagne ont conclu un pacte secret, avides de mettre la main sur le pétrole et de pousser leurs intérêts économiques : l’accord Sykes-Picot5. Cet accord donnait à la France le contrôle de ce qui est aujourd’hui le Liban, la Syrie, le Kurdistan et certaines parties de la Turquie, tandis que la Grande-Bretagne s’emparait de la plus grande partie de ce qui est aujourd’hui l’Irak, la Jordanie et la Palestine. Outrés d’avoir été trompés, des mouvements nationalistes ont vu le jour pour réclamer l’indépendance et l’autodétermination qui leur avaient été promises.6

Les mouvements de femmes se sont constitués dans tous ces pays, à la fois dans le cadre de ces mouvements nationalistes émergents et pour émettre leurs revendications face à leur propre oppression7. En Égypte, par exemple, les femmes de toutes les classes sociales ont été fortement impliquées dans les activités culturelles, sociales et politiques de la révolution de 1919 contre les Britanniques – elles étaient dans la rue et prononçaient des discours dans les mosquées et les églises8. Hoda Shaarawy, une militante de premier plan, a fondé l’Union féministe égyptienne dès 19239. La révolution égyptienne a eu un effet profond sur la Palestine et a encouragé les luttes palestiniennes contre le colonialisme et le sionisme.

Depuis le début du 20e siècle, l’activisme des femmes palestiniennes est lié à la lutte de résistance nationale. Les femmes ont participé aux manifestations qui ont éclaté contre la déclaration Balfour de 1917, lorsque la Grande-Bretagne s’est engagée publiquement à établir « un foyer national pour le peuple juif » en Palestine, ce qui a ouvert la voie à la Nakba (« catastrophe ») – le nettoyage ethnique de la Palestine, en 194810. La Grande-Bretagne a ensuite reçu un mandat pour administrer la Palestine et la Transjordanie de la part de la Société des Nations en 1920. Le mouvement national palestinien était né, et avec lui le mouvement des femmes palestiniennes. Dans les années 1920, les dirigeantes du mouvement des femmes étaient issues de la même classe de commerçant·e·s urbain·e·s et de propriétaires terrien·ne·s ruraux·ales que les dirigeants du mouvement national. En 1929, des femmes issues de familles influentes, principalement de la classe moyenne et supérieure, ont fondé l’Association des femmes arabes (AFA). Elles esquissèrent un programme qui s’attaquait à la politique britannique de facilitation de l’immigration sioniste et de répression des revendications palestiniennes d’autodétermination nationale11.

L’AFA est née de l’escalade de la crise provoquée suite à la révolte du Buraq, autrement connue comme le Massacre de 1929. Ce soulèvement a été provoqué par l’augmentation, par les autorités du mandat britannique, du nombre de fidèles Juif·ve·s autorisé·e·s à accéder au Buraq ou mur occidental de la mosquée d’Al-Aqsa à Jérusalem, un lieu saint qui avait été placé sous l’autorité des musulman·e·s pendant des siècles. Le 15 août 1929, un groupe de sionistes mené par les membres du Betar (« forteresse ») – une organisation de jeunesse de droite – marche vers le mur. Iels brandissent des drapeaux sionistes, chantent l’hymne sioniste et crient « le Mur est à nous »12. En réponse, les Palestinien·ne·s se soulèvent, ce qui entraîne une semaine de violence au cours de laquelle 113 Juif·ve·s et 116 Palestinien·ne·s sont tué·e·s. La plupart des affrontements ont eu lieu entre les Palestinien·ne·s et la police britannique, bien que des groupes terroristes sionistes aient également attaqué les forces britanniques. Toutefois, sur les 1 330 personnes arrêtées, la plupart étaient des Palestinien·ne·s, et trois condamnations à mort ont été prononcées13.

La première conférence de l’AFA, qui s’est tenue à Jérusalem en 1929, dénonçait la déclaration Balfour et l’immigration juive, les mauvais traitements infligés aux prisonnier·e·s arabes par la police et l’application de châtiments collectifs14. A partir des années 1930, l’AFA était activement impliquée dans les manifestations, la collecte de fonds et le soutien aux prisonnier·e·s et à leurs familles, inondant la presse de la cause nationale palestinienne, offrant des services tels que les soins médicaux et l’éducation, et participant à des conférences régionales, panarabes et internationales de femmes. En juin 1931, l’AFA a appelé les femmes à faire grève à l’occasion de l’anniversaire de l’exécution par les autorités britanniques des Palestiniens condamnés pour rébellion lors du soulèvement de Buraq, même après que le mouvement national dirigé par les hommes eut abandonné son projet15. La participation accrue des femmes aux manifestations au début des années 1930 a jeté les bases du militantisme des femmes lors de la Grande Révolte.

Grande révolte arabe de 1936-1939

En 1936, le ressentiment latent à l’égard de l’occupation britannique s’est transformé en colère généralisée et a éclaté en rébellion ouverte16. Les ouvrier·e·s et les paysan·ne·s poussèrent leur « élite dirigeante hésitante à adopter des positions plus radicales »17. La révolte fut brutalement réprimée par les Britanniques, souvent avec l’aide des milices sionistes, à l’aide de châtiments collectifs, de centres de détention, de déportations, d’arrestations massives, de démolitions de maisons, de raids sur les villages, de frappes aériennes, de restrictions de mouvements et de la loi martiale18. Depuis, il y a eu une tendance à minimiser les différences entre l’élite et les militant·e·s de base « pour minimiser les initiatives populaires et souligner l’unité au sein du Haut Comité Arabe »19. De la même manière, l’activisme, le militantisme et la radicalisation des femmes pendant la révolte ont été marginalisés. Les femmes de l’élite urbaine participaient aux manifestations, collectaient d’importantes sommes d’argent pour financer la rébellion et formaient des comités de femmes dans les villages. Elles tenaient des réunions secrètes pour soutenir les militants et harcelaient le gouvernement de protestations et de condamnations écrites. Ces comités de femmes se sont notamment créés dans des régions du pays où il y avait eu peu d’activités organisées auparavant. La révolte commença par une grève générale. Les membres de l’AFA parcoururent les villes pour convaincre les commerçant·e·s d’observer la grève et brisèrent les vitrines de ceux qui n’obtempéraient pas20.

Alors que les membres de l’AFA étaient des femmes urbaines éduquées issues de familles des classes moyennes et supérieures, les paysans (fellahin), y compris les paysannes (fellahat), ont joué un rôle crucial dans la révolte en dehors des organisations formelles. Ces femmes ont enduré le pire de la répression de la révolte, car ce sont leurs communautés dans les zones rurales qui ont subi les attaques physiques. Elles cachaient des armes dans leurs vêtements ou dans les champs et parcouraient le terrain, partageant des informations avec les guérilleros, telles que l’emplacement et les itinéraires d’approvisionnement des troupes britanniques, et étaient souvent prises dans des tirs croisés. Les Britanniques qualifiaient les paysannes d’agitatrices « belliqueuses » qui incitaient les jeunes hommes à devenir des combattants21.

Dès le début de la révolte, les paysannes étaient prêtes à utiliser la violence pour défendre leurs villages et les hommes de leur communauté en s’opposant aux perquisitions et aux raids. Par exemple, les femmes lapidaient la police depuis les toits lorsqu’elle venait procéder à des arrestations. Contrairement aux femmes des villes, certaines paysannes ont rejoint la révolte armée, comme Fatma Ghazzal, qui a été tuée lors de la bataille de Wadu Azzoun en 193622. La fréquence à laquelle les paysannes ont été arrêtées pour contrebande ou possession d’armes suggère que les femmes ont joué un rôle militaire plus important que ce qu’on s’imagine ou que ce qui a été enregistré. Dans l’ensemble, les femmes ont pris des risques considérables et, lorsqu’elles étaient poursuivies pour possession d’armes, elles étaient condamnées à de lourdes peines d’emprisonnement allant de sept à dix ans.

Pendant la révolte, pour la première fois, les étudiantes s’organisèrent et se mobilisèrent23. Dans la région de Galilée, les écolières se mirent en grève, empêchèrent les autres élèves d’aller à l’école et manifestèrent tout au long de la fin du mois de mai et du mois d’avril 1936. Ça a posé de tels problèmes à la police que les Britanniques ont menacé de fermer les écoles et ont dit aux pères de famille qu’ils devraient payer une amende si leurs filles commettaient des infractions.

Les mouvements panarabes de femmes, qui avaient émergé dans toute la région, ont joué un rôle essentiel dans le soutien apporté aux femmes palestiniennes. Tandis que dans certains pays, comme l’Égypte et la Tunisie, les premières organisations de femmes formulaient des revendications politiques telles que l’abolition de la polygamie, le droit au divorce et le droit de vote, les femmes de Palestine se concentraient sur des revendications nationalistes. Les femmes des mouvements panarabes soutenaient leurs sœurs palestiniennes en portant la cause palestinienne sur le devant de la scène régionale et internationale24. Ces organisations de femmes étaient très conscientes de leurs luttes respectives et exprimaient une solidarité réciproque, notamment en condamnant la répression britannique contre les Palestinien·ne·s pendant la Grande Révolte. Au début des années 1930, les femmes arabes (et du Moyen-Orient) commencèrent à coopérer de manière plus formelle au niveau régional, et des conférences furent organisées à Damas, Beyrouth et Bagdad entre 1930 et 1932. Elles ont culminé avec l’appel de Hoda Shaarawy à une conférence qui s’est tenue au Caire en octobre 1938. Les délégations de Syrie, du Liban, d’Irak et de Palestine ont demandé l’abolition du mandat britannique sur la Palestine, l’abrogation de la déclaration de Balfour et l’interdiction de l’immigration juive et de la vente de terres aux Juif·ve·s25. Ce soutien panarabe a renforcé le moral des femmes palestiniennes, réduit leur isolement et conféré un statut international à leur mouvement26.

Parmi les militantes renommées de la Grande Révolte, il y avait Sadhij Nassar qui était co-éditrice et rédactrice du journal El-Carmel, créé à Haïfa en 1908. Ce journal consacrait, au début des années 1920, une section aux problématiques concernant les femmes. Les articles de Sadhij Nassar portaient aussi bien sur l’égalité entre les sexes que sur la nécessité d’une lutte révolutionnaire contre le colonialisme. Son nom apparaît fréquemment dans les archives britanniques en tant qu’organisatrice de manifestations et de grèves. Elle était une épine dans le pied des Britanniques, qui qualifiaient ses articles d’« incendiaires » et les manifestations qu’elle organisait de particulièrement « virulentes et dangereuses »27. Cela lui a valu d’être arrêtée et détenue dans la prison pour femmes de Bethléem pendant près d’un an28. Après la Grande Révolte, sans surprise, les Britanniques se sont entendus avec les éléments conservateurs de la société palestinienne pour étouffer l’activisme des femmes et leur faire quitter la rue. Les femmes, en particulier dans les villes, étaient de plus en plus souvent rappelées à l’ordre lorsqu’elles portaient des vêtements occidentaux et lorsqu’elles participaient à des activités politiques en dehors de leur domicile sans être escortées.

Ce virage conservateur s’est étendu à d’autres éléments du mouvement nationaliste, qui ont tenté d’imposer des normes relatives au comportement, aux déplacements et à la tenue vestimentaire des femmes29. Toutefois, ces exhortations à porter des vêtements plus traditionnels ont également été adressés aux hommes, et revenaient donc aussi à faire preuve d’allégeance à la cause nationaliste. Ellen Fleischmann rapporte que des Palestiniennes chrétiennes, en revenant sur la Grande Révolte, ont déclaré qu’elles portaient le voile pour éviter de « ressembler à des Juives », « pour montrer qu’elles étaient arabes » et « pour ressembler aux autres Arabes »30. Même l’AFA était divisée sur la ligne à tenir sur les tenues des femmes : entre celles qui voulaient signifier leur émancipation en portant des vêtements modernes et celles qui considéraient que cela risquait de leur aliéner les masses.

Lorsque la révolte pris fin en 1939, de nombreux·ses Palestinien·ne·s avaient été tué·e·s, emprisonné·e·s ou exilé·e·s, et leurs directions ont été pratiquement détruites. Les colons juif·ve·s, qui avaient combattu aux côtés des colons britanniques pour réprimer la révolte, ont pu consolider leur position, s’armer et acquérir de l’expérience militaire. Malgré cela, le mouvement des femmes est resté actif et tenace jusqu’à ce que les événements de 1948 perturbent violemment la société palestinienne et ses institutions sociales et politiques31.

La Nakba

La Nakba de 1948 a déchiré la société palestinienne. L’État israélien a été établi sur 80 % du territoire palestinien mandataire, et entre 80 et 90 % des Palestinien·ne·s ont été expulsé·e·s et dispersé·e·s dans des camps de réfugié·e·s à Gaza (annexée par l’Égypte), en Cisjordanie (annexée par la Jordanie), au Liban et en Syrie. Cette situation a eu des conséquences dévastatrices pour la résistance et l’infrastructure sociale et institutionnelle que le mouvement des femmes avait construites au cours des décennies précédentes.

Les femmes de la classe moyenne ont poursuivi la longue tradition de travail caritatif en créant des soupes populaires et des orphelinats pour combler le vide créé par l’effondrement des services. Toutefois, le fossé entre les femmes de l’élite et celles issues de milieux ruraux ou pauvres a persisté : ces dernières ont souvent été marginalisées et considérées comme les bénéficiaires passives de la charité de l’élite. En Cisjordanie, les organisations politiques ont été interdites et les expressions de l’identité palestinienne réprimées. Bien que cela ait eu pour effet d’inhiber l’activisme politique des organisations de femmes, la montée du nationalisme panarabe a attiré certaines femmes dans des groupes politiques clandestins tels que le parti arabe socialiste Ba’th (« résurrection ») fondé en Syrie, le Parti communiste jordanien et le Mouvement nationaliste arabe, où les femmes occupaient une place reconnue32. L’entrée plus généralisée des femmes dans des organisations mixtes a marqué un changement dans leur engagement. L’expérience acquise par les femmes dans ces partis les a amenées à jouer un rôle important dans la lutte contre l’occupation israélienne après 1967.

La lutte contre l’occupation : 1967-82

Le tournant tactique de la lutte palestinienne contre l’occupation vers la guérilla et la lutte armée à la fin des années 1960 a été largement influencé par deux facteurs. Tout d’abord, l’illusion que les États arabes étaient capables ou désireux de libérer la Palestine s’est effondrée. Cela est dû à la défaite humiliante et rapide infligée par Israël aux armées arabes en 1967, ainsi qu’à l’invasion et à l’occupation du territoire restant de la Palestine historique, de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Deuxièmement, le mouvement de résistance palestinienne est arrivé à maturité au cours d’une période de bouleversements politiques et sociaux mondiaux, lorsque des mouvements révolutionnaires et de libération ont mené une résistance anti-impérialiste dans le Sud global, comme au Viêt Nam et en Algérie. Des mouvements étudiants, féministes et pour les droits civiques ont éclaté partout dans le monde.

Ces facteurs ont contribué à transformer l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) d’un simple relais des régimes arabes en une organisation politique indépendante et mobilisatrice. La Ligue arabe, sous la direction du président égyptien Gamal Abdel Nasser, avait créé l’OLP en 1964 dans le but de contrôler le nationalisme palestinien tout en prétendant défendre sa cause33. Cependant, dans le même temps, les Palestinien·ne·s d’en bas s’organisaient collectivement et appelaient à la lutte armée contre Israël. En 1968, le groupe dominant de l’OLP était le Mouvement de libération nationale de la Palestine (Fatah ; harakat at-tahrir al-watani l-filastini), mais le nombre de factions et de groupes de guérilla augmentait de façon spectaculaire34.

De nombreux·ses Palestinien·ne·s ont été influencé·e·s par cette nouvelle culture de la résistance, y compris une jeune génération de femmes qui se sont tournées vers des tactiques plus militantes. Cette deuxième génération de femmes a refusé d’accepter l’idée dominante selon laquelle le rôle des femmes de la société palestinienne était uniquement de prendre soin de la nation – idée reprise par certaines sections du mouvement nationaliste – et a soutenu la mise à l’ordre du jour d’un changement social émancipateur35. C’est dans ce contexte qu’a été créée en 1965 le Syndicat Général des Femmes Palestiniennes (en anglais, General Union of Palestinian Women – GUPW, NdT), qui rassemblait plusieurs organisations de femmes, relançant ainsi le mouvement des femmes palestiniennes. Bien qu’affiliée à l’OLP, selon Jehan Helou, la GUPW a dû lutter pour son indépendance en son sein36.

L’invasion et l’occupation par Israël de la Cisjordanie, de Gaza et du plateau du Golan en 1967 ont créé 250 000 à 300 000 réfugié·e·s supplémentaires. Ces Palestinien·ne·s furent placé·e·s sous un régime militaire direct et de nouvelles formes d’oppression sociale, économique et politique virent le jour. La GUPW a commencé à répondre aux besoins immédiats des femmes et des enfants palestinien·ne·s, notamment en créant des centres de santé, des orphelinats, des garderies et des repas subventionnés. Pour autant, les femmes n’étaient pas prêtes à se cantonner à un rôle de « travailleuses sociales ». Au contraire, elles se sont également engagées dans la résistance armée. Les principales factions ont établi des camps pour la formation militaire et politique des femmes révolutionnaires en Jordanie, puis au Liban.

Leila Khaled dans les années 70

Les figures marquantes de combattantes dans l’iconographie mondiale telles que Leila Khaled témoignent du changement qui s’est opéré au cours de cette période. Elle était membre du Front palestinien de libération de la Palestine (FPLP) et une commandante de l’opération Dawson’s Field, qui a fait d’elle la première femme à détourner un avion37. Shadia Abu Ghazalah, autre membre active du FPLP, a refusé de quitter la Palestine et a été tuée dans sa ville natale de Naplouse en novembre 1968, à l’âge de 19 ans, lorsque la bombe qu’elle préparait a explosé accidentellement. Ces femmes faisaient partie d’un mouvement d’intense critique envers les régimes arabes, de Yasser Arafat (leader de l’OLP) et de la bourgeoisie palestinienne. Khaled a vu très jeune « la misère, la faim et l’humiliation » dans les camps de réfugié·e·s38. Dans son autobiographie, elle oppose le sort des nombreuses femmes vivant dans les camps dans des conditions atroces à celui de la bourgeoisie palestinienne, qui vivait dans les villes et bénéficiait d’un niveau de vie plus élevé, d’une plus grande mobilité, d’un meilleur accès à l’éducation et d’une certaine immunité contre la violence. Cela l’a amenée à développer une analyse de classe de la libération nationale en ce qui concerne les acteur·ice·s du changement et l’objectif de la lutte. Khaled pensait que les ouvrièr·e·s et les paysan·ne·s réuni·e·s dans une organisation politique révolutionnaire étaient la seule force de changement39. Pour elle, le but ultime de la lutte palestinienne était « la construction d’une société socialiste dans laquelle les Arabes et les Juif·ve·s peuvent vivre en paix et en harmonie »40.

Bien que l’attention accordée aux figures féminines, parmi lesquelles Leila Khaled, ait été disproportionnée par rapport au nombre relativement faible de femmes impliquées dans la lutte armée, l’histoire a largement négligé le rôle prépondérant des masses de femmes au cœur de la résistance dans les camps de réfugié·e·s au Liban entre 1969 et 198241. Jehan Helou, participante et témoin oculaire, rappelle que les camps de réfugié·e·s palestinien·ne·s se sont soulevés en 1969 pour expulser le célèbre service de renseignement de l’État libanais, le Deuxieme Bureau, qui surveillait et contrôlait tous les aspects de la vie des habitant·e·s des camps. Ces femmes, issues de milieux paysans, étaient intrépides et faisaient barrage de leurs corps devant l’entrée des camps face aux attaques de l’armée libanaise.

L’OLP n’avait pas de vision ou de programme centré sur les questions relatives aux femmes et le mouvement de résistance n’a jamais développé d’idées complètement abouties concernant l’égalité des genres. Certains courants ont continué à prôner un rôle traditionnel pour les femmes. Les partis de gauche, tels que le FPLP, le Front démocratique de libération de la Palestine (FDLP) et le Parti communiste, avaient une approche plus favorable de la question du genre. Cependant, à l’instar de leurs homologues occidentaux, ils considéraient l’oppression des femmes uniquement comme un sous-produit de l’oppression coloniale et de classe, et la traitaient comme telle42.

La participation des femmes à la résistance armée a contribué à remettre en question les postulats traditionnels sur les rôles des hommes et des femmes. Néanmoins, les tensions autour de l’émancipation des femmes dans certaines sections du mouvement nationaliste sont restées vives et de nombreuses femmes ont rapporté le sexisme auquel elles étaient confrontées au sein du mouvement43. Khaled décrit la réaction à sa demande d’implication dans la lutte armée au cours de l’été 1968 ainsi :

On nous a suggéré d’accomplir deux tâches importantes : aider les mères surchargées de travail dans les camps de réfugié·e·s et rendre visite aux familles de nos martyrs. « Le travail social, raillai-je, n’est pas une révolution sociale, je veux participer pleinement à la révolution »44.

Bien que de nombreuses jeunes femmes aient voulu militer, elles ont dû mener une lutte face à leurs parents, à la société en général et au mouvement de résistance lui-même. Par exemple, les femmes bien établies dans la résistance devaient souvent demander l’accord de leur famille pour pouvoir impliquer leurs filles dans l’activisme. Julie Peteet affirme que, si la plupart des femmes acceptaient l’idée qu’elles avaient un rôle à jouer dans la lutte, la relation entre la politique et la vie domestique était controversée. Par exemple, l’idée que le militantisme ne devait pas compromettre la capacité d’une femme à remplir ses fonctions de gardienne du foyer et de soignante était largement répandue. Par conséquent, pour prendre part à la lutte, les femmes devaient « affronter de plein fouet les règles culturelles régissant le comportement des femmes »45. Cela se reflète dans le traitement différencié à l’égard des héros masculins (al-fida’i) et féminins (al-fida’iyya) qui ont été élevé·e·s au rang de célébrités dans les récits nationalistes. L’image contradictoire de la mère traditionnelle protégeant le foyer a persisté et était plus acceptable socialement que celle de la femme militante. Ces combattantes ne bénéficiaient pas du même statut que leurs homologues masculins et avaient parfois du mal à se réintégrer dans leur communauté46. Khaled l’avait compris et a déclaré : « Alors que mes sœurs occidentales parlent d’oppression de classe et d’oppression sexuelle… j’ai dû faire face à quatre types d’oppression : nationale, sociale (le poids des traditions et des habitudes), de classe et sexuelle »47.

Malgré ces obstacles, le fait de participer à la lutte a fait évoluer la confiance des femmes. Comme l’a écrit Jehan Helou, « les femmes d’avant-garde ont déchiré les traditions oppressives, sont sorties de leur cage et ont introduit leurs propres conventions et normes, prenant ainsi le contrôle de leur vie »48. Elles ont notamment rejeté les contraintes qui pesaient sur leur mobilité, saisi les occasions de voyager, y compris les bourses offertes par l’Union soviétique, ont choisi elles-mêmes leur mari ou ne se sont pas mariées du tout. Julie Peteet décrit comment les jeunes femmes des camps et les activistes ont commencé à se décrire et à décrire les autres femmes avec un tout nouveau vocabulaire, en utilisant un répertoire de termes et de catégories intrinsèquement actifs, politiques et nationalistes, tels que militantes (nashitat), politisées (musayyasat), combattantes (fida’iyyat), travailleuses (‘amilat), combattantes (munadilat) et martyrs (shahidat). Ces nouvelles conceptions de soi s’inscrivaient clairement dans un sentiment de fierté nationale et d’engagement dans la lutte et, plus important encore, dans un sentiment d’autonomie49.

Quoi qu’il en soit, la lutte pour la libération des femmes était fermement et inextricablement liée à la libération nationale. Peteet cite Samireh, une militante du Fatah, qui exprime ce sentiment commun :

Je pense que parce que les femmes auront combattu aux côtés de leurs maris, de leurs frères ou de leurs autres camarades, après la libération nationale, la libération des femmes sera un résultat naturel. Elles auront le droit de dire : « J’ai fait la même chose que vous ; je vais prendre ma liberté ». Nous ne disons pas : « Les hommes sont nos ennemis ; nous devons les combattre. » C’est une erreur. L’homme lui-même n’est pas libéré. Il est déshérité, déraciné ; il n’a pas d’État ; il n’a pas de droits. Comment pouvons-nous gagner nos droits face à un homme qui n’en a pas 50?

Lorsque le centre de la résistance, y compris l’OLP, s’est déplacé au Liban, la création du Front national palestinien (FNP) a permis d’organiser et de renforcer les luttes de masse à l’intérieur de la Cisjordanie occupée51. Le FNP a été créé en 1972, essentiellement à l’initiative des jeunes, et s’est étendu à toute la Cisjordanie en soutenant les organisations de la société civile et les mouvements de travail bénévole. En 1976, lorsque pour la première fois des dizaines de milliers de femmes de Cisjordanie ont obtenu le droit de vote aux élections municipales, les femmes et les jeunes ont joué un rôle majeur dans l’élection de nationalistes jeunes et progressistes dans les conseils municipaux de toute la Cisjordanie. Cela a constitué un changement par rapport à la dynamique traditionnelle de la politique par en haut en faveur d’un activisme organisé plus inclusif et a contribué à la naissance d’un nouveau mouvement de femmes en 197852.

La naissance du nouveau mouvement des femmes : 1978

La création du Comité de Travail des Femmes (en anglais, Women’s Work Committee – WWC, NdT) a été annoncée lors de la Journée internationale des femmes en 197853. Contrastant avec le nombre relativement faible de femmes impliquées dans la lutte armée, il s’agissait d’une nouvelle organisation de masse axée sur la mobilisation des femmes dans les villages et les camps. La naissance de ce nouveau mouvement de femmes a été influencée par la croissance et la diffusion des idées féministes dans le monde entier, la participation accrue des femmes dans la population active et l’amélioration de l’accès à l’enseignement universitaire en Cisjordanie à partir du milieu des années 1970.

Ces nouvelles militantes de Ramallah et d’al-Bireh, dont certaines étaient étudiantes à l’université de Bir Zeit, étaient principalement issues de familles petites-bourgeoises travaillant dans le commerce ou les professions libérales. Cependant, elles ont rompu avec la tradition de l’action caritative des femmes des classes moyennes et supérieures en s’attaquant aux problèmes des travailleuses et des villageoises employées de manière informelle dans l’agriculture. Le Comité de Travail des Femmes a agi au niveau national pour éduquer et impliquer les femmes dans le militantisme, en exigeant le droit de lutter, de travailler, d’être éduquées et d’être représentées équitablement dans les processus décisionnels. Reconnaissant que l’analphabétisme, le surmenage, la pauvreté et la dépendance économique des femmes dans les villages constituaient un obstacle à l’activisme politique, elles ont lancé des projets visant à résoudre les problèmes matériels quotidiens auxquels les femmes étaient confrontées. Elles ont notamment créé des centres de santé et des structures d’accueil pour les enfants.

Au fur et à mesure que l’économie de la Cisjordanie était annexée à celle d’Israël, de plus en plus de femmes se sont retrouvées sur le marché du travail. Le Comité de Travail des Femmes a encouragé les femmes à adhérer à des syndicats avec lesquels elles se sont coordonnées pour améliorer les conditions de travail et les droits des travailleuses. Par exemple, le syndicat des travailleur·se·s du textile a connu un afflux de femmes au cours de cette période grâce aux efforts du Comité de Travail des Femmes, en particulier à Ramallah. En 1983, le syndicat des travailleur·se·s du textile de Ramallah a soutenu une grève des travailleuses de l’usine Danaji à Ramallah. Les travailleuses ont obtenu une augmentation de 50 % des salaires moyens et une augmentation encore plus importante pour les salaires les plus bas54.

La plupart des membres fondatrices du Comité de Travail des Femmes étaient inspirées par le programme politique du parti de gauche FDLP. Cependant, au début des années 1980, les tensions au sein du mouvement nationaliste palestinien dans les territoires occupés ainsi qu’au sein de l’OLP ont provoqué une scission dans le mouvement des femmes, de même que dans le mouvement syndical. Néanmoins, les quatre comités de femmes qui ont émergé, vaguement affiliés à quatre factions politiques, n’ont pas été atteints par le même niveau de factionnalisme que celui présent dans les autres organisations nationalistes55. Ils ont réussi à atteindre un haut degré de coordination dans des projets concrets et dans l’activisme politique. Par exemple, ils ont organisé conjointement un sit-in dans les bureaux de la Croix-Rouge pour soutenir les grèves de la faim des prisonnier·e·s politiques.

En 1987, les comités de femmes comptaient des milliers de membres dans toute la Cisjordanie et, dans le cas de trois comités de gauche, dans la bande de Gaza également56. Leur succès a suscité la surveillance et la répression des autorités israéliennes, qui ont tenté de fermer des expositions de produits traditionnels et artisanaux, ont confisqué du matériel et ont fermé des locaux. De nombreuses membres des comités ont été régulièrement convoquées pour des interrogatoires dans les quartiers généraux militaires locaux, et les dirigeantes ont été soumises à des restrictions de voyage ou assignées à résidence. Il a même été rapporté que des militantes avaient été menacées de perdre leur emploi si elles refusaient de devenir des informatrices. Comme le fait remarquer Rita Giacaman, le fait que le mouvement était vaste et sans forme fixe le rendait difficile à réprimer : « Ce type de mouvement ne dépend pas structurellement de la présence de deux ou même dix personnes. Et on ne peut pas mettre soixante à soixante-dix mille paysannes en prison »57.

Les comités de femmes ont marqué un tournant dans le militantisme féminin en Palestine. Leur principale réalisation a été d’élargir la base de classe des activistes pour inclure les villageoises et les travailleuses dans leur organisation et leur direction. L’implication des femmes dans la lutte a jeté les bases de leur participation à la première intifada.

Les femmes pendant la première intifada: 1987-93

En décembre 1987, un véhicule israélien percute des voitures transportant des travailleur·se·s palestinien·ne·s à Gaza, tuant quatre Palestiniens. Ce fut le déclencheur d’un soulèvement de masse contre l’occupation israélienne – la première intifada. Lorsque les manifestations ont éclaté, les femmes ont participé : elles ont manifesté, jeté des pierres sur les soldat·e·s, transporté des pierres, construit des barrages routiers et lutté physiquement contre les soldat·e·s pour empêcher les arrestations58. Au moins dans les premières phases, les actions étaient spontanées. Avec le recul, la militante Zahira Kamal commente :  « Pour la première fois, nous n’attendions pas les instructions des dirigeants à l’étranger »59. Les femmes sont sorties de leur maison dans des villages, des camps de réfugié·e·s et des zones pauvres. La confrontation avec les soldat·e·s est devenue un acte collectif, les femmes faisant appel les unes aux autres dans les communautés pendant les raids pour protéger les personnes arrêtées. Les femmes étaient le pilier des manifestations et, en mars 1988, les manifestations organisées par les femmes s’élevaient à 115 par semaine60. Les Forces de défense israéliennes (FDI) ont répondu par une répression sévère. Il y a eu des expulsions de masse et des détentions et les femmes ont été soumises à des tirs réels, à l’inhalation de gaz lacrymogène et à des coups. Elles ont été arrêtées et emprisonnées alors qu’elles tentaient de protéger d’autres personnes. Seize femmes sont décédées pendant les manifestations61.

Les femmes étaient à l’avant-garde des comités populaires qui ont proliféré dans les villes et les villages pour soutenir l’intifada. Elles ont organisé des grèves et ont physiquement résisté à des arrestations malgré les couvre-feux et les restrictions de mouvement. Ces comités traitaient de tous les aspects de la vie quotidienne, y compris le stockage et la distribution des aliments, les soins de santé et la mise en place d’écoles clandestines. Les services de garderie ont prolongé leurs heures pour soutenir l’activisme des femmes en dehors de la maison. Des coopératives agricoles et des projets d’autonomie ont été soutenus, ce qui a desserré la dépendance à l’égard de l’économie israélienne, renforcé la confiance des femmes et leur a donné une certaine indépendance matérielle.

Une activiste, Naima al-Sheikk Ali, explique que bien que le travail social ait été nécessaires pour maintenir l’intifada, ce dernier était également une vitrine pour le travail politique et pour la construction de la résistance. De plus, ces activités étaient particulièrement importantes pour l’organisation et le renforcement du boycott des produits israéliens62. Un documentaire, Naila et le soulèvement, montre la position centrale que les femmes ont occupé – en première ligne de la lutte, en organisant des manifestations et en défendant leurs communautés au niveau local dans les villages et les quartiers. Ce documentaire montre également le coût personnel payé par les femmes à travers l’emprisonnement et la détention.

Néanmoins, la participation des femmes à l’activisme a remis en question les idées reçues sur ce qui était socialement acceptable. Penelope Strum explique comment la participation des femmes à l’intifada « a secoué les vieilles idées sur les femmes dépendantes dont l’honneur serait de se cacher des yeux du public »63. Des barrières culturelles ont été brisées ou du moins repoussées. Les femmes ont pu être plus mobiles et plus présentes dans les rues ; elles ont pu davantage revendiquer leurs choix par rapport aux partenaires de mariage et la coutume du prix de la fiancée a été abandonnée.

Après une première phase spontanée du soulèvement, la résistance s’est institutionnalisée lorsque les comités populaires ont été placés sous l’autorité du Commandement unifié de l’Intifada nouvellement formé dans les territoires occupés. Bien que cette mesure ait bénéficié d’un soutien populaire, la participation active des femmes et leur rôle de premier plan dans les comités de quartier de l’Intifada ne se sont pas traduits par un rôle de premier plan des militantes dans la direction du mouvement national. Strum décrit les communiqués du Commandement unifié de l’Intifada comme « profondément traditionnels, patriarcaux et condescendants »64. « Les hommes sont appelés “frères médecins” et “frères travailleurs”, tandis que les femmes ne sont mentionnées qu’en relation avec d’autres, avec les enfants ou les personnes âgées, et sont félicitées pour leur fermeté (sumud). » Au cours de la troisième année de l’Intifada, les avancées dans les positions sociales des femmes ne se sont pas traduites par des acquis concrets. Les années suivantes ont vu la résurgence des mariages précoces forcés, et l’ancien concept d’Isqat (« perte d’honneur » ou « honte ») est revenu avec plus de force. En conséquence, davantage de femmes et de filles ont abandonné leur éducation dans les écoles et les universités.

La pression sur les femmes a été aggravée par l’utilisation accrue d’agressions sexuelles ou les menaces d’agressions sexuelles par les FDI pour dissuader les jeunes palestiniennes de militer. L’instrumentalisation par les autorités israéliennes du concept d’honneur familial, qui persistait dans la société palestinienne, associée aux pratiques d’abus sexuel, de harcèlement et de chantage ont renforcé la place des notions d’honneur et de pureté. Une étude a révélé que, pendant l’Intifada, la peur que les jeunes femmes et les adolescentes étaient les plus susceptibles d’exprimer était celle de l’Isqat65.

Malgré ces obstacles, une partie des femmes ont regardé au-delà leur activisme dans la lutte contre l’occupation et ont soulevé des questions sur les problèmes sociaux auxquels elles étaient confrontées pendant l’intifada. En décembre 1990, la conférence des femmes « L’Intifada et certains problèmes sociaux », tenue à Jérusalem, a réuni 500 femmes de différentes organisations et courants politiques. La conférence a soulevé des questions concernant le faible niveau de participation des femmes à la prise de décision, l’importance de l’éducation, l’impact des mariages précoces, les objections à l’imposition du voile, les problèmes rencontrés par les femmes prisonnières et la discrimination dans l’éducation et le travail66. Une organisation de gauche de la résistance des femmes, l’Union des comités de travailleuses palestiniennes, a soulevé des questions plus radicales relatives à la contraception et a commencé à organiser des conférences sur le mariage précoce, le divorce et la division du travail à la maison67.

L’expérience de l’Intifada a ouvert la possibilité d’une transformation sociale, mais les acquis que les femmes avaient remportés par l’élargissement de leur activité politique et leur transgression des frontières sociales ont été trop facilement renversés. L’institutionnalisation du soulèvement, l’intensification de la répression israélienne et l’influence croissante de campagnes conservatrices ont eu des répercussions négatives sur la participation politique des femmes. Elles ont été célébrées comme « les mères des martyrs », « les créatrices de générations » et les « sacrifiées de la nation » plutôt que d’être saluées pour leur militantisme. Faisant écho aux expériences des femmes à la fin d’autres moments d’apogée de lutte, Yara Hawari souligne que bien que les femmes aient été glorifiées pendant leur incarcération, elles ont souvent fait face à des obstacles sociaux à leur libération, notamment des difficultés pour se marier ou pour trouver un emploi68.

L’oppression israélienne incessante a intensifié la baisse du militantisme des femmes en affaiblissant les comités des femmes et de quartier, entraînant la perte de réseaux de soutien et de capacités de coordination. Avec l’augmentation de l’insécurité, la famille est devenue la principale source de protection et de stabilité et le rôle domestique traditionnel des femmes a été renforcé.

La formation et le développement du Hamas

La formation du Hamas en 1987, au début de la première Intifada, a créé un nouveau contexte pour le leadership des femmes et leur participation à la lutte. Les racines du Hamas se trouvaient dans la branche palestinienne des Frères musulmans qui, jusqu’alors, était une organisation de protection sociale et de charité. Cependant, l’explosion de l’Intifada a provoqué un changement radical dans leurs tactiques. Iels ont commencé à critiquer violemment l’OLP et ont rejeté la solution à deux États ainsi que tout compromis avec Israël. Comme de nombreux autres mouvements islamistes contemporains, le Hamas a également mis en avant une vision conservatrice du rôle des femmes dans la société. Cela s’est reflété dans une campagne, commencée à Gaza à partir de 1988, pour imposer le port du foulard aux femmes palestiniennes. Cependant, il serait trop grossier de comprendre cela seulement comme antimoderne et anti-femmes. Premièrement, à part son caractère religieux, le hijab a rapidement commencé à prendre une signification nationaliste, comme cela avait été le cas lors de la révolte de 1936-1939. Le Hamas établit des liens directs entre le port du hijab et la résistance à l’occupation, l’héritage national et la protection contre les soldat·e·s israélien·ne·s. Toutefois, sa justification repose sur l’importance de la « pureté » des femmes, dont la tenue ou le comportement « impudique » déshonorerait les martyrs et aiderait involontairement le projet de l’ennemi pour corrompre la nation69. Deuxièmement, comme le souligne Jad, l’islam n’est pas un ensemble fixe de décrets ; sa forme spécifique émerge de circonstances sociales et politiques particulières70.

Certains islamistes avaient des opinions assez réactionnaires sur le rôle des femmes dans la société. Pourtant, le rôle joué par les femmes dans les principales organisations islamistes, en particulier le Hamas, reflétait des changements sociaux plus larges ainsi que leur volonté de revendiquer pour elles-mêmes des espaces d’organisation. Les cas de femmes adoptant des formes modernes de hijab étaient visibles dans toutes les sociétés à majorité musulmane et contenait des élans contradictoires, à la fois d’adaptation à une société sexiste et de protestation contre celle-ci71. Comme le suggère Jad, plutôt que de mettre l’accent sur les aspects théoriques de l’Islam, il convient de s’intéresser à l’expérience vécue des femmes et à la manière dont elle influe sur leur vie quotidienne72. Jad propose un récit passionnant sur la manière dont la nécessité pour le Hamas de recruter des femmes, combinée à leurs propres attentes en matière de participation politique, les a amenées à jouer un rôle important au sein de l’organisation73. Certains de ces débats seront développés plus en détail dans un deuxième article.

Conclusion

La répression brutale et implacable de l’État israélien pendant la première intifada a fait des ravages sur les Palestinien·ne·s, qui étaient épuisé·e·s au bout de six ans de guerre. Les dirigeant·e·s du Fatah au sein de l’OLP, dont Yasser Arafat est le nom le plus connu, ont voulu contrôler le mouvement populaire qui avait explosé en 1987. Ce dernier a entamé des « pourparlers de paix », connus sous le nom d’accords d’Oslo (1993), qui ont mis fin au mouvement de masse. Les accords d’Oslo, qui ont créé l’Autorité palestinienne en 1994, ont eu un impact profond sur le militantisme des femmes. Ils ont été négociés de l’extérieur et signés sans aucune consultation avec les femmes qui étaient en première ligne. Il s’agissait d’un accord entre deux parties très inégales qui fragmentait le territoire palestinien en remodelant les espaces et l’économie des Territoires Occupés au profit d’Israël. Les suites de la première Intifada ont donc produit un nouveau contexte pour la lutte contre l’occupation. L’afflux d’aide de pays et d’organisations pour soutenir l’Autorité palestinienne conformément aux intérêts impérialistes a miné les luttes populaires des femmes. Cette aide s’inscrit dans un programme néolibéral qui individualise la lutte pour les droits des femmes et fixe des conditions pour l’obtention de financements de projets, au détriment de réponses plus militantes et collectives74. La négociation des accords d’Oslo par l’OLP a donné raison au Hamas qui lui reprochait sa complicité avec Israël et a consolidé sa position en tant que seule opposition sérieuse à l’occupation. Comme nous l’avons abordé brièvement, l’ascension de l’islamisme palestinien a eu des conséquences contradictoires et complexes sur la participation des femmes à l’activité politique. 

Néanmoins, les défis qui se sont posés après 1994, à la suite des accords d’Oslo, ne remettent pas en question le fait que les femmes ont été, et continuent d’être impliquées dans la lutte contre l’occupation de la Palestine. Comme le souligne Ted Swedenburg, il y a des parallèles entre la grande révolte dans les années 1930 et la première intifada à la fin des années 1980, lorsque les femmes « ont quitté leurs maisons pour imposer les prix des produits, des boycotts et des grèves : pour organiser des manifestations, faire de la contrebande de produits, confronter les soldat·e·s…»75. Ces deux soulèvements comportent un important élément de classe. Bien que le rôle des femmes de la classe moyenne dans la résistance domine la littérature, ce sont les paysannes, les villageoises et les femmes des camps qui étaient les cibles principales de la répression et qui ont physiquement confronté les Britanniques et les sionistes. Les femmes de la bourgeoisie et des classes moyennes avaient plus de choix en terme de lieu de vie et d’accès à l’éducation, ce qui les protégeait dans une certaine mesure de la severité de la répression.

Bien que certaines femmes aient soulevé des questions concernant leur oppression, même au début du mouvement nationaliste, ces idées ont été principalement absorbées par l’agenda nationaliste. Cela a cependant changé à la fin des années 1960, lorsque l’explosion du radicalité sous forme de mouvements anti-impérialistes et la croissance du féminisme ont influencé la lutte palestinienne. Cela a donné confiance à certains groupes de femmes de soulever et d’exprimer des questions concernant leur propre libération avec plus de force en ce qui concerne le mariage, le comportement, le travail et leur rôle dans le mouvement nationaliste.

Du début du 20e siècle à la fin de la première intifada, l’activisme politique des femmes leur a permis de déstabiliser les rôles de genre existants et de se créer une place dans la sphère publique. Pourtant, les acquis au point culminant de la lutte étaient fragiles et devaient être constamment défendus. Il y avait des tensions entre la participation des femmes à la lutte et la persistance d’idées conservatrices sur le rôle de ces dernières. Pour autant, les femmes continuent de résister physiquement au quotidien dans la défense de leurs villages contre les incursions et les démolitions et ont fait partie des manifestations de rue à Gaza76. Dans les villes et les villages de Cisjordanie, les femmes sont descendues dans les rues pour protester contre la violence domestique, et il y a une histoire complexe à raconter sur le rôle continu des femmes au sein du Hamas et dans le mouvement nationaliste islamique.

Reconnaître et apprendre de ces moments forts de lutte remet en question l’invisibilité ou la marginalisation des femmes dans l’histoire de la résistance palestinienne et constituent une source d’inspiration pour les générations présentes et futures.


Références

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Traduit par A2C

  1. Merci à Bayan Haddad et Jehan Helou d’avoir accepté d’être interviewées et de commenter ce texte. Nous aimerions aussi remercier Judy Cox, Phil Marfleet, et Manal Shqair pour leurs commentaires. Anne Alexander a été généreuse en soutenant la rédaction de cet article du début à la fin et en commentant les brouillons successifs. ↩︎
  2. Karmi, 2021. ↩︎
  3. Fleischmann, 1999. ↩︎
  4. Cette description provient des écrits d’Edward Saïd. Il montre comment les peuples du Moyen-Orient sont considérés comme inférieurs, arriérés et ayant besoin d’être sauvés pour justifier la domination occidentale. Voir Abdo, 2014, p. 57, et Saïd, 1978. ↩︎
  5. Nommé d’après les fonctionnaires chargés de partager le butin. ↩︎
  6. Par exemple, les Britanniques avaient promis l’indépendance aux Palestinien·ne·s en échange de leur aide pour vaincre les forces ottomanes en Palestine. ↩︎
  7. En Égypte, en Iran, au Liban, en Syrie et en Turquie, les femmes ont toutes fondé des journaux, des revues ou des magazines dès la fin du XIXe siècle. Voir Fleishmann, 2003, et Arenfeldt et Al-Hassan Golley, 2012. ↩︎
  8. Fahmy, 2001. ↩︎
  9. Hoda Shaarawy en a été la première présidente jusqu’à sa mort en 1947. Avant de devenir l’Union féministe égyptienne, l’organisation, qui avait des liens avec le parti Wafd, s’appelait le Comité central des femmes wafdistes. ↩︎
  10. Au début du mandat, les Britanniques ont commencé à faciliter l’immigration des Juif·ve·s européen·ne·s en Palestine. Entre 1922 et 1935, la population juive est passée de 9 % à près de 27 % de la population totale. ↩︎
  11. Elle a ensuite pris le nom d’Union des femmes arabes (UFA). Parmi les familles, on trouve les Husseinis, les Nashashibis, les Abd-al-Hadis, les Budeiris, les Khaldis et les ‘Alamis. La création d’une organisation nationale avec des branches locales à Acre, Ramla, Haïfa, Jaff, Naplouse, Nazareth et Gaza a marqué une transformation significative des stratégies d’organisation des femmes. Voir Hiltermann, 1991. ↩︎
  12. Pappé, 2003, p15. ↩︎
  13. Fleischmann, 2002, pp115-116. ↩︎
  14. Kuttab, 1993. ↩︎
  15. Trois rebelles ont été pendus en juin 1930. ↩︎
  16. L’élément déclencheur de la révolte fut la mort en 1935 de Izz ad-Din al-Qassam, un militant reconnu, qui a été tué lors d’un échange de coups de feu avec les Britanniques. ↩︎
  17. Swedenburg, 2003, p20. ↩︎
  18. Pour une histoire détaillée de cette répression, voir Hughes, 2019. ↩︎
  19. Swedenburg, 2003, p. 20. La direction générale de la révolte par le Haut Comité arabe a été désastreuse tant au niveau politique qu’organisationnel. Les propriétaires terriens nationalistes de droite et les dirigeants urbains traditionnels qui le dominaient ont canalisé les frustrations des paysan·ne·s palestinien·ne·s, des travailleur·se·s et des participant·e·s de la classe moyenne avec une rhétorique antijuive, mais ils ont cherché un compromis avec les autorités britanniques et se sont rendus en octobre 1936. Voir Cliff, 2000, chapitre 1. ↩︎
  20. La grève a duré d’avril à octobre 1936 et s’est terminée grâce à l’intervention de dirigeants arabes venus de l’extérieur du pays. Voir Swedenburg, 2003. ↩︎
  21. Fleischmann, 2003, p126. ↩︎
  22. Fleischmann, 2003. ↩︎
  23. Al-Qassam avait reconnu le potentiel militant des jeunes femmes lors de ses activités clandestines dans les années 1930. Il a donné des cours d’éducation et de religion à des écolières et a créé une organisation de femmes appelée rifaqat al-qassam (Camarades d’al-Qassam). ↩︎
  24. Sur le sujet, voir Fleischmann, 2003. ↩︎
  25. Il y eut une seule déléguée d’Iran. ↩︎
  26. Fleischmann, 2003, p185. ↩︎
  27. Swedenburg, 2003, p177. ↩︎
  28. Hughes, 2019 ↩︎
  29. Swedenburg, 2003, p181. ↩︎
  30. Fleischmann, 2003, p133. ↩︎
  31. En 1937-38, l’AFA s’est scindée en deux organisations, reflétant la fragmentation du mouvement nationaliste palestinien. ↩︎
  32. Kuttab, 1993. ↩︎
  33. Pour une analyse détaillée, voir Kilani, traduit par A2C ici : https://www.autonomiedeclasse.org/histoire/strategies-pour-la-liberation-anciens-et-nouveaux-arguments-de-la-gauche-palestinienne/ ↩︎
  34. Il existait des différences idéologiques entre le Fatah, le Front populaire de libération de la Palestine et le Front démocratique populaire de libération de la Palestine sur les questions sociales et les relations avec les États arabes. ↩︎
  35. Kawar, 1996. Son livre est basé sur 34 entretiens avec des dirigeantes issues de toutes les factions du mouvement de libération. ↩︎
  36. Helou, 2022. ↩︎
  37. En septembre 1970, quatre avions à destination de New York et un autre à destination de Londres ont été détournés par des membres du Front populaire de libération de la Palestine. Trois des avions ont été contraints d’atterrir à Dawson’s Field, situé dans un désert isolé près de Zarka, en Jordanie. ↩︎
  38. Khaled, 1973, p15. ↩︎
  39. Pour une critique des stratégies de la gauche palestinienne, voir Kilani, 2024. ↩︎
  40. Khaled, 1973, p91. ↩︎
  41. Sur les 800 000 Palestinien·ne·s qui ont été expulsé·e·s de leurs maisons, 100 000, principalement originaires de villages du nord de la Palestine, sont allé·e·s au Liban. ↩︎
  42. Il convient de souligner qu’au milieu et à la fin des années 1960, cette approche était une caractéristique des mouvements de gauche en général, y compris en Occident. L’explosion du mouvement de libération des femmes a remis en cause la relégation de ces questions. ↩︎
  43. Hawari, 2019; Kawar, 1996. ↩︎
  44. Khaled, 1973, p46. ↩︎
  45. Peteet, 1991, p95. ↩︎
  46. Kawar, 1996. ↩︎
  47. Khaled, 1973, p25. ↩︎
  48. Helou, 2022, p6. ↩︎
  49. Peteet, 1991, p99. ↩︎
  50. Peteet, 1991, p97. ↩︎
  51. Il a été initialement créé par des indépendant·e·s et le Parti communiste jordanien. Le Fatah, le FDLP et le FPLP l’ont rejoint l’année suivante. ↩︎
  52. Jad, 2018; Kayali, 2021; Richter-Devrou, 2018. ↩︎
  53. Pour une analyse détaillée, voir Jad, 2018, et Kuttab, 1993. ↩︎
  54. Joost, 1991, p159. ↩︎
  55. Les quatre factions politiques : le Comité de travail des femmes (Women’s Work Committee – WWC) soutenait le Front démocratique pour la libération de la Palestine ; les femmes pro-communistes ont fondé les Comités des femmes travailleuses (1981) ; les femmes soutenant le Front populaire pour la libération de la Palestine ont fondé l’Union des comités des femmes palestiniennes (1981) ; les femmes pro-Fatah ont fondé le Comité des femmes pour le travail social (1982). Entre-temps, le WWC a changé son nom en Union des comités de travail des femmes (Union of Women’s Work Committees). ↩︎
  56. Les trois organisations de gauche étaient l’UPWC, le FPWAC et l’UPWWC. Elles affirmaient adhérer à une idéologie marxiste-léniniste, bien qu’elle soit confinée au niveau de la direction. La plupart des femmes de la base s’impliquaient par le biais d’activités plutôt que sur la base d’un programme politique. ↩︎
  57. Rita Giacaman citée dans Hiltermann, 1991, p139. ↩︎
  58. Giacaman et Johnson, 1990. ↩︎
  59. Voir le documentaire Naila et le soulèvement. ↩︎
  60. Swedenburg, 2003. ↩︎
  61. Entre décembre 1987 et décembre 1991, on estime que 99 femmes (11 % du total) ont été tuées et qu’en juillet 1991, 3 000 avaient été arrêtées. Voir Kuttab, 1993. ↩︎
  62. Voir le documentaire Naila et le soulèvement. ↩︎
  63. Strum, 1998. ↩︎
  64. Strum, 1998, p201. ↩︎
  65. Shalhoub-Kevorkian cité dans Kayali, 2023. ↩︎
  66. La résolution finale de la conférence « The Intifada and Women’s Social Issues » qui s’est tenue à Jérusalem le 14 décembre 1990 peut être lue en ligne : www.marxists.org/history/etol/newspape/atc/6969.html. Texte traduit par News From Within. ↩︎
  67. L’organisation des femmes du bloc progressiste, y compris le parti communiste palestinien. Voir Hiltermann, 1991. ↩︎
  68. Hawari, 2019. ↩︎
  69. Jad, 2018, pp103-104. ↩︎
  70. Jad, 2018. ↩︎
  71. MacLeod, 1992. ↩︎
  72. Jad, 2018. ↩︎
  73. Jad, 2018. ↩︎
  74. Prugl, 2016. ↩︎
  75. Swedenburg, 2003, p194. ↩︎
  76. Gadzo et Jnena, 2018. ↩︎