Retour sur le rassemblement du 6 juin 2020 à Rennes
Comme dans beaucoup de villes de France, se tenait le 6 juin un rassemblement LAISSEZ NOUS RESPIRER contre les crimes policiers racistes. Ce rassemblement était appelé par le collectif Vérité et Justice pour Babacar, soutenu entre autres par Racines Radicales Rennes (nouveau collectif antiraciste de Rennes 2), Youth for climate, Nous Toutes 35, Solidaires ÉtudiantEs, la CGT Poste et Télécom’, l’Union Pirate, Résistances Ecolo Rennes, NPA, UCL… Il avait été organisé en seulement trois jours, et annoncé interdit par la Préfecture. En un si court laps de temps, la communication est donc surtout passée par les réseaux sociaux, des chaînes de textos, et accompagnée d’une centaine d’affiches, réparties dans plusieurs quartiers.
Nous étions environ 2000 personnes à nous rassembler place Charles de Gaules dès 14h, et ce malgré l’interdiction du rassemblement annoncée la veille par la préfecture pour des prétextes sanitaires et de délais de dépôt du rassemblement.
L’affluence est impressionnante et la police se fait discrète. Beaucoup de personnes n’ayant jamais manifesté, des personnes de toutes tranches d’âge, mais majoritairement des lycéen•nes et des jeunes étudiant•es. La composition de la manifestation est loin des rendez-vous traditionnels militants, et ça fait du bien, il y a un espoir que les digues craquent, que les luttes se renforcent. On note une proportion de personnes Noires plus importantes que pour bien des manifestations, dans la lignée de la marche des solidarités parisienne du 30 mai, et du rassemblement devant le TGI à Paris pour Adama Traoré, quelques jours plus tard.
Après les prises de paroles des collectifs, appréciés par les premiers rangs du rassemblement, Awa Gueye – qui mène le combat pour obtenir la vérité et la justice dans la mort de son frère Babacar, appelle à une minute de silence en posant un genou au sol. Reproduite dans de nombreuses villes, l’image est forte. La famille d’Allan Lambin – tué à Saint-Malo par la police en février 2019, est également présente, ainsi qu’un collectif antiraciste de Lorient.
Aux alentours de 16h, une grande partie des personnes partent en cortège en direction du centre ville, suivant l’appel d’une personne qui avait prit la parole. Elles sont très vite bloquées par le dispositif policier. Un point de fixation se forme et pendant 1h le cortège se sépare afin de contourner le dispositif policier, éviter les lacrymogènes et continuer de manifester.
La manifestation arrive à s’élancer dans le centre ville de Rennes, elle est dynamique et déterminée : ce sont plus de 1500 personnes qui parviennent à manifester dans le centre historique de la ville (interdit aux manifestations depuis 2016) sous les applaudissement d’un grand nombre de passant•es et de travailleur•ses des commerces de la rue Le Bastard. La police est contrainte de reculer à plusieurs reprises et le cortège semble toujours aussi dense, défilant dans différentes rue du centre-ville. La manifestation tente de rejoindre la cité judiciaire mais est bloquée par un dispositif policier encore plus important. Elle prend fin peu avant 20h après plusieurs jets de lacrymos.
Aujourd’hui, une manifestation interdite, contre les crimes policiers racistes, a pu avoir lieu dans les rues de Rennes durant 4 heures. On pouvait y sentir une vraie puissance collective et un rapport de force en notre faveur. Il est important de préciser ici que c’est le nombre et la détermination qui ont permis ce rapport de force. La police semblait marcher sur des œufs face au nombre mais aussi à l’absence de pratiques émeutières, qui l’ont contraint à éviter les charges tant la colère était palpable.
Cette journée a permis de ressentir une grande puissance collective et une réelle satisfaction de manifester aux côtés de centaines de personnes qui manifestaient pour la première fois, avec tant de dynamisme, motivées par les images des derniers jours.
La suite est en train de se dessiner, notamment pour des rassemblements les 13 et le 20 juin contre les violences policières, dates qui sont déjà appelées par la Marche des Solidarités, regroupant des collectifs de personnes sans-papiers et des organisations antiracistes, syndicales, politiques.
Clément (Rennes)