Au fil du mouvement, mis à jour le 07.07
NANTERRE
Retour sur le début de la mobilisation à Nanterre par un camarade habitant sur place
Mardi 27 juin 2023, entre 8h et 9h en plein cœur de Nanterre, dans une banlieue parisienne populaire. Un contrôle policier vire au drame lorsqu’un policier tue un jeune conducteur de 17 ans qui tentait de fuir un policier qui le braquait d’une arme tout en le menaçant de mort. L’émotion est générale et se propage dans tout Nanterre mais aussi dans d’autres banlieues et grandes villes françaises. Le soir, en début de soirée, la tension est palpable : des policiers, pour certains armés de LBD, prennent position dans toute la ville en attente d’un soulèvement. Les parents de jeunes enfants sentent que la nuit sera longue et mouvementée. Certains comprennent la colère et l’approuvent, tous rentrent chez eux avec leurs enfants pour qu’ils ne traînent pas la nuit au milieu des affrontements. Il est 22h30, la révolte commence à Nanterre, mais pas que.
Dès lors que l’heure du dîner sonne à sa fin, la jeunesse sort de ses immeubles pour laisser s’exprimer sa colère. Des affrontements éclatent dans plusieurs endroits dans Nanterre. Dans la cité Pablo Picasso qui a la réputation d’être difficile, une bataille de positions commence à l’intérieur même de la cité. Des voitures brûlent, des barricades improvisées sont dressées sur les routes puis incendiées, limitant ainsi la logistique des voitures de police. A l’intérieur de la cité, la BAC tente d’interpeller les émeutiers. Une bataille entre émeutiers jetant des pierres, des feux d’artifice et des mortiers sur la police et utilisant l’environnement de la cité à leur avantage d’un côté et de l’autre la police ayant recours à des charges, des grenades et du gaz lacrymogène. Il fait nuit, la cité est lugubre et mal éclairée, les policiers habillés en noirs peuvent surgir de tous les côtés pour piéger les révoltés. L’affrontement se déplace alors sur l’avenue Pablo Picasso, plus spacieuse, mieux éclairée et surtout offrant une visibilité et une prévisibilité des charges policières. Des barricades incendiées sont dressées, des voitures sont brûlées. Les révoltés sont essentiellement des jeunes de quartiers populaires mais également quelques militants révolutionnaires. Cependant, ces derniers ne viennent pas avec leurs drapeaux ou quelques éléments permettant de les identifier tel quel. Ils viennent individuellement, parfois contre la volonté de leurs appareils. Les affrontements se poursuivent jusqu’à 3-4h à Nanterre mais pas qu’à Nanterre.
Nanterre n’est pas la seule ville mobilisée la nuit contre ça. Le premier soir, des révoltes sous la même forme se sont produites à Suresnes, Gennevilliers, Colombes, Asnières, Villeneuve, Clichy, Courbevoie, Mantes-la-Jolie, Mureaux, Montfermeil, Vitry, Argenteuil, Hem, Bordeaux, Colmar, Marseilles et Paris. Les soirs suivants, les révoltes se poursuivent la nuit mais également le jour. A Nanterre, une marche blanche organisée jeudi 29 juin a regroupé plus de 20 000 personnes. La dynamique est lancée et à présent la répression ne parvient pas à éteindre la mèche allumée. La marche fut réprimée avec du gaz lacrymogène ce qui a conduit à des affrontements en pleine journée au cœur de Nanterre. Le soir, d’autres villes ont rejoint la révolte et elle se propage dans tout le pays. Cela va jusqu’à dépasser les frontières françaises : en Belgique ou en Allemagne, on se révolte contre le racisme et les violences policières. Le gouvernement français déploie des unités d’élite inadaptées au maintien de l’ordre : BRI, GIGN, RAID… Si cela témoigne d’une intensification de la répression, cela témoigne aussi d’une incapacité à faire cesser la révolte. Les unités conçues pour cela ne suffisent plus et il faut trouver d’autres services de répression qui ne sont pas prévues pour cela.
Face à cette situation, la gauche oscille entre appel au calme et exigence de justice. Certains ont le courage de refuser explicitement d’appeler au calme, préférant appeler à la justice. Côté syndical, la CGT a demandé que justice soit faite sur cette affaire. Côté révolutionnaire, des militants essaient de discuter avec les jeunes des quartiers populaires en bas de leurs tours afin de créer du lien.
Cet article est écrit alors que la mobilisation est encore en cours.
Adrien, Nanterre
TOULOUSE
Retour du rassemblement du mercredi 5 juillet
Rassemblement appelé par la LDH et plusieurs organisations politiques et syndicales. On n’était pas très nombreux.se.s, entre 700 et 1000 maximum. Prises des paroles très institutionnelles avec quelques demandes plus radicales. Les concepts de racisme systémique et racisme d’État ont été utilisés par certaines organisations politiques. L’ambiance parmi les présent·es était de tristesse face aux derniers événements, mais un peu de sidération et de sentiment d’impuissance exprimés par certaines personnes. Très peu de participation des personnes ou des associations des quartiers dit populaires.
Du côté de l’assemblée Toulouse VS Darmanin, qui s’est le mardi 04 juillet
Ça faisait un moment que l’AG ne se réunissait pas. Très active pendant les mobilisations autour de la réforme de retraites en faisant le travail de lier les questions du travail et de la répression avec les propositions des lois Darmanin et l’opération Wuambushu en Mayotte, avec des réunions publiques, points fixes pendant les manif, opération des tractages et collages.
Avec la fin du mouvement contre la réforme et le report du vote sur les lois Darmanin, l’AG avait réduit énormément le nombre des réunions et des participant.e.s.
Suite au meurtre du jeune Nahel par la police, quelques militant.e.s on décide d’appeler à une AG pour essayer de nous organiser pour des nouvelles mobilisations. Même avec le travail d’envoyer des messages aux camarades, nous avons réussi à rassembler seulement 11 personnes. Nous avons pris la décision de participer aux prochains rassemblements et manifs, mais nous avons constaté que nous ne sommes pas assez fort·es pour essayer de lancer un mouvement plus large et faire le lien avec les lois anti-immigration et la répression aux frontières et aux personnes migrantes.