Notre antiracisme

La question de la lutte antiraciste est structurante pour notre groupe, beaucoup de camarades sont impliquéEs sur les différents fronts, que ce soit le soutien aux migrantEs (réfugiéEs ou sans papiers), la lutte contre les violences policières au travers des collectifs justice et vérité (pour Lamine Dieng par exemple) ou encore la lutte contre l’islamophobie. Or, les dernières évolutions sur ce point nous montrent que cette intervention se fait de plus en plus urgente et importante. Les crimes policiers (meurtres, viols…) continuent, et l’année 2017 est d’ores et déjà très chargée : le viol de Théo Luhaka et le meurtre de Shaoyao Liu en sont deux exemples.

De plus, entre janvier et juillet 2017, plus de 100 000 migrantEs ont traversé la méditerranée et 2 250 y ont trouvé la mort, ce qui signifie que la lutte pour l’ouverture des frontières devient de plus en plus centrale, surtout quand on voit la répression qui touche les migrantEs et leur soutiens (comme dans la Vallée de la Roya). Par ailleurs, chaque attentat revendiqué ou imputé à Daech est instrumentalisé par les classes dirigeantes pour stigmatiser toute une partie de la population, ceux que Sarkozy nommait les « musulmans d’apparence ».

Cette accélération du racisme n’est pas un fait anodin. On estime qu’en France, un tiers des classes populaires est immigrée ou issue de l’immigration, cette fraction de notre classe est directement visée. Or, le capitalisme traverse depuis plus de 10 ans une crise économique majeure qui affecte directement les capacités de direction des classes dominantes. Par le biais du racisme, la bourgeoisie cherche à réaliser plusieurs objectifs :

  • lier la classe ouvrière blanche à leurs patrons contre les raciséEs ;
  • justifier une série d’interventions à l’étranger, au Mali, en Syrie et Irak notamment où les ressources naturelles sont nombreuses ;
  • créer une fraction de notre classe qui soit plus opprimée, plus exploitée, qui subira encore d’avantage les réformes économiques de Macron. Or, cette fraction est déjà fortement touchée : contrôles au faciès, discrimination au logement, à l’emploi, salaires plus faibles ou avancements de carrière plus lents en sont des symptômes.

Le racisme est donc inscrit dans les gènes du capitalisme et si sa forme change selon les réalités matérielles de la période, il est un des outils de maintien de la domination des capitalistes. C’est ce qui rend l’élaboration d’une stratégie antiraciste extrêmement importante, voire centrale aujourd’hui.

Les origines du racisme

Le racisme est un processus long qui a connu différentes évolutions dans l’histoire, que l’on peut diviser en quatre phases. Phases dans lesquelles on a pu observer une évolution dans l’idéologie et l’argumentation de la classe dirigeante afin de hiérarchiser la population en fonction de sa couleur de peau et d’exercer une série d’oppressions à l’encontre des personnes non blanches (ou racisées).

On peut dater l’émergence du racisme comme idéologie entre  le 17e et le 18e siècle avec le développement de l’esclavage, l’instauration de plantations et la colonisation du « Nouveau Monde ».

Et contrairement à ce qu’ont pu penser certains auteurs comme Manning Marable, l’idéologie raciste est apparue lors de l’expansion du capitalisme avec cette nécessité de justifier le recours à l’esclavage des africains mais aussi de motiver et consolider l’atrocité de la traite des noirs et du travail forcé à vie. C’est d’ailleurs à cette période qu’il y a eu une forte accumulation du capital. Cela permet de comprendre que l’idéologie raciste est fortement liée à la trajectoire du développement et de l’expansion du capitalisme mondial et qu’il y a eu un réel enjeu pour la bourgeoisie dans le fait de la développer, à une période où le travail servile n’était plus possible. On peut voir, de plus, que l’abolition de l’esclavage n’a pas permis de supprimer le racisme, ce qui montre bien le lien entre celui-ci et le capitalisme.

A cette époque, ces justifications étaient basées sur l’infériorité biologique des Noirs. Notamment par des justifications religieuses comme avec le procès de Valladolid qui a permis aux colons d’orchestrer le génocide des amérindiens mais également la traite des noirs en affirmant que ceux-ci n’avaient pas d’âmes. Mais aussi à travers le développement d’une pseudo science définissant l’idée de races biologiquement distinctes et hiérarchisées. Cette science a eu pour but de créer des différences raciales inhérentes aux groupes opprimés. D’ailleurs, David Hume, philosophe des Lumières, déclarait : « Je suis porté à soupçonner les nègres, et en général toutes les autres espèces des hommes (car il en existe quatre ou cinq différentes), d’être naturellement inférieures aux blancs ».

Cette citation permet de faire une transition avec la deuxième phase d’évolution qu’a connu le racisme à travers la colonisation. En Europe, le racisme est apparu dans un contexte de concurrence entre les nations européennes dans le contrôle des richesses et des matières premières nécessaires à leur supériorité économique. Mais les classes bourgeoises ont dû faire face à un obstacle assez important quant à la justification de la colonisation et leur possibilité de spolier les ressources des pays colonisés. En effet, l’expansion des idées universalistes des Lumières (la Révolution française, la Révolution américaine, etc.), avec les questions de l’égalité entre les hommes, du rationalisme, etc a rendu complexe pour la bourgeoisie la justification de traiter différemment d’autres êtres humains.

L’argument a alors été de dire que l’homme blanc est supérieur intellectuellement aux personnes non blanches et que c’est de leur devoir d’aider ces « peuples », « inférieurs » en les « civilisant ». Cette idée de « fardeau de l’homme blanc », dont la mission est d’aider ces civilisations à se développer, a été centrale (avec le développement du nationalisme entre le XIXe et le début XXe siècle). Cet argument est d’ailleurs encore souvent utilisé à travers le récit national quand on entend par exemple de la bouche de Nicolas Sarkozy, dans son discours de Dakar de 2007 que « le colonisateur a construit des ponts, des routes, des hôpitaux ». Mais cela a été aussi le moment où la définition d’une race blanche est devenue un processus global et où le racisme est devenu un élément d’oppression et d’exploitation systémique.

La troisième phase apparaît en 45 quand il a fallut reconstruire une Europe totalement démolie. Après l’extermination des juifs et des tziganes (1/4 de la population européenne) par les nazis et le développement d’un antisémitisme (biologique notamment) exacerbé, le racisme biologique a muté en un racisme culturel ou essentialiste. Tout simplement, parce que l’inégalité des races n’était plus acceptable moralement et scientifiquement, il a donc fallut le modifier. Le racisme s’est alors basé sur une hiérarchie des cultures. Ce renouvellement explique en partie sa force aujourd’hui, en quoi il fait partie intégrante de la société et en quoi il la structure ; notamment parce qu’il est beaucoup plus « subtil ». La venue d’une main d’œuvre immigrée a permis aux classes dirigeantes d’accentuer cette concurrence entre les travailleurs nationaux et étrangers. Elle s’est traduite par une différenciation des salaires et des droits des travailleurs indigènes (pas de cotisations pour la retraite), par une ségrégation, un accès aux logements discriminant, etc. Mais aussi avec le développement du bouc émissaire de la crise, du chômage et de l’insécurité. Ainsi, quand l’État a retiré peu à peu son bras social à grands coups de privatisations, de casse du droit du travail et des protections sociales et qu’il a dû avancer son bras répressif pour contenir les désordres liés à l’insécurité sociale qu’il génère, le racisme est devenu une arme redoutable pour la classe dirigeante. Cela a permis dès les années 80 de renforcer le racisme institutionnel, à un moment où l’État providence a commencé à se désagréger. Le racisme a alors revêtu un triple avantage :

  1. Fournir un bouc émissaire au sentiment d’insécurité sociale due au renforcement de l’exploitation et à la croissance de la pauvreté et du chômage ;
  2. Diviser les travailleur·se·s entre elles·eux et donc limiter leur résistances face à cette situation ;
  3. Justifier les politiques sécuritaires mises en place pour mater ces mêmes résistances.

Mais depuis les années 90 et surtout après 2001, le racisme est entré dans une quatrième phase avec l’islamophobie. Le nouvel ennemi tant interne qu’externe des sociétés occidentales est devenu les musulman·es, ou la personne qui laisserait penser l’être par différents critères (langue arabe parlée ou écrite, vêtements, fréquentations, …). Et donc les arguments pour justifier les guerres impérialistes au Moyen-Orient ont d’abord été un discours civilisateur puis la volonté de rétablir la paix dans le monde et de leur apporter la démocratie. On se souvient notamment des discours de Bush en 2003. Mais c’est surtout un moyen pour la bourgeoisie européenne de contrôler les ressources minières stratégiques (exemple en Libye) et de trouver un ennemi public interne comme cause de l’insécurité dans nos pays.

La question du privilège blanc

Concernant le privilège blanc, en France, la question a surtout été traitée par rapport aux avantages symboliques conférés aux personnes blanches plus qu’à propos d’un possible intérêt matériel de la classe ouvrière blanche au maintien du racisme. Néanmoins, ce débat a eu une certaine importance dans les pays anglo-saxons et Alex Callinicos revient en partie sur les arguments principaux des défenseurs de l’existence d’un privilège blanc dans « Racisme et luttes des classes ». Et je dirais qu’il y en a deux principaux qui en ressortent : l’existence d’une aristocratie ouvrière privilégiée et l’idée d’un échange inégal.

Certains auteurs, notamment des nationalistes noirs, se sont réappropriés la théorie léniniste de « l’aristocratie ouvrière » dans l’idée que tous les travailleurs des pays économiquement avancés reçoivent leur part des exactions de l’impérialisme. Ainsi des auteurs comme Ron Ramdin ont déclaré que « l’exploitation et la dégradation de la classe ouvrière coloniale fut un élément indispensable du maintien du niveau de vie de la classe ouvrière britannique ». De plus, l’idée que la classe ouvrière européenne dans son ensemble formerait une aristocratie du travail est soutenue par la théorie selon laquelle il existerait un processus d’« échange inégal » entre le Nord et le Sud. La preuve essentielle de cette théorie réside dans le fait que le niveau des salaires est plus élevé dans les pays capitalistes avancés que dans les pays du Tiers Monde. Ainsi, les tenants de l’échange inégal, en se réappropriant la théorie marxiste de l’exploitation pour soutenir leur analyse, pensent que les travailleur·se·s du Tiers-Monde seraient plus exploité·e·s que les occidentaux.

Pour cet argument d’échange inégal, Callinicos fait une distinction assez importante concernant l’argument que la classe ouvrière coloniale serait plus exploitée que la classe ouvrière occidentale. Selon lui, ça serait même le contraire car le degré auquel un·e travailleur·se est exploité dépend, non pas de son niveau de vie absolu, mais de la quantité de plus-value qu’iel produit, relativement à son salaire. Donc si on considère qu’un travailleur occidental est plus qualifié et donc plus productif qu’un travailleur du Tiers Monde, il est en conséquence plus exploité. Ainsi, « un ouvrier bien payé peut très bien être plus exploité qu’un travailleur mal payé, parce que le premier produit, par rapport à son salaire, une plus grande quantité de plus-value que le second ». Donc l’argument d’un possible bénéfice de la classe ouvrière occidentale au maintien du racisme parce que son salaire serait supérieur à la classe ouvrière coloniale ne tient pas ou est alors très limité.

Mais plus généralement, on peut y opposer aussi deux arguments assez simples pour expliquer que le racisme a un effet néfaste sur l’ensemble de la classe ouvrière et qu’elle accentue encore plus la domination des capitalistes à l’encontre de la classe ouvrière TOUTE entière  :

D’abord, le fait que les travailleur·se·s soient en concurrence les un·es avec les autres sur le marché du travail favorise le développement du racisme : le travailleur immigré est plus demandé car il est moins cher et moins qualifié. Cela est souvent vécu par les travailleurs « nationaux » comme un concurrent qui abaisse leur niveau de vie.

Ensuite, le racisme ne pourrait pas se développer dans la classe ouvrière si les travailleurs blancs n’y trouvaient pas un intérêt, ne serait-ce que symbolique. Cela montre l’importance de la dimension idéologique. Bien que « travailleurs immigrés » et « travailleurs nationaux » constituent deux groupes aux intérêts identiques, ils se retrouvent divisés de sorte que les salaires des deux peuvent être nivelés vers le bas. Le travailleur blanc qui participe à l’alimentation du racisme reçoit en échange une compensation psychologique puisqu’on lui fait croire qu’il appartient au groupe des dominants. Uni de cette façon aux capitalistes, il devient à la fois oppresseur à l’encontre d’une partie de sa propre classe mais renforce également l’exploitation qu’il subit. L’exemple de l’occupation de l’usine de Citroën par des ouvriers indigènes dans les années 80 contre les suppressions de postes et où des travailleurses blancs accueillent la police en chantant la Marseillaise et « les arabes à la Seine » illustre bien ce paradoxe et l’illusion psychologique des travailleur·se·s blanc·he·s.

Pour illustrer ses deux arguments, le sociologue marxiste américain Al Szymanski a testé aux Etats-Unis sur les 50 États de l’Union cette hypothèse d’un possible bénéfice matériel de la classe ouvrière blanche au racisme. Et il est venu à la conclusion que « plus la discrimination raciale est intense, plus bas sont les salaires des blancs du fait de la variable intermédiaire de la solidarité de la classe ouvrière – en d’autres termes, le racisme désavantage économiquement les travailleur·ses blanc·hes parce qu’il affaiblit l’organisation syndicale en détruisant la solidarité entre travailleur·se·s noir·es et blanc·hes ». Le racisme est en conséquence contraire aux intérêts des travailleurs blancs, même lorsqu’on comprend ces intérêts dans les termes les plus étroitement matériels.

Les travailleurs blancs acceptent les idées racistes non pas parce que c’est dans leur intérêt, mais à cause de la façon dont est organisée la concurrence au niveau du marché du travail entre différents groupes de travailleurs. Et cela rend possible pour la bourgeoisie la « racialisation de la division du travail » et permet de mettre en place une certaine grille de salaire qui lui est avantageuse. C’est pourquoi certains travailleurs blancs refusent certains métiers physiques et non qualifiés affectés à certaines catégories de personnes racisées, par exemple femmes de ménages, aides soignante, manœuvres et maçons dans le BTP, etc.

Le racisme est bel et bien une idéologie systémique qui tire sa force du capitalisme qui l’organise et la structure. Elle peut en effet avoir pour but de trouver un bouc émissaire à la crise économique actuelle, éviter l’unification de la classe ouvrière et justifier les guerres impérialistes par exemple. Frantz Fanon disait d’ailleurs « le racisme n’est qu’un élément de l’oppression systématisée. C‘est pourquoi l’oppression économique légitime le racisme. » Mais il ne faudrait pas tomber dans l’écueil de dire que le racisme n’est là que pour diviser notre camp social car en soi ça en viendrait à minimiser les discriminations et oppressions que subissent au quotidien les personnes racisées. Une fois qu‘on a évoqué les origines et la nature du racisme, il faut se demander stratégiquement, comment nous militant·e·s anti-racistes concerné·e·s ou non concerné·e·s on lutte contre ces oppressions et cette division de notre classe.

Les luttes antiracistes

En France, les organisations de gauche ont joué un rôle assez important dans la normalisation du racisme à travers le choix de ses luttes et le rendant « respectable » selon Said Bouamama. En premier lieu avec l’idéologie universaliste des Lumières et avec l’idée que la France a été à l’avant garde des civilisations. A travers également ce qu’il appelle «  la construction d’un consensus colonialiste », il explique que l’idéologie colonialiste était tellement imprégné dans la société française qu’elle a pendant longtemps fait consensus et même dans la gauche.  Et c’est passé par abandon du mot d’ordre d’indépendance nationale à partir du Front populaire, promotion de l’Union française après 1945, vote des pouvoirs spéciaux en 1956. Mais aussi à travers une approche culturaliste en justifiant les interventions impérialistes et militaires pour le bien des peuples agressés où il faut émanciper l’autre malgré lui et si nécessaire par la violence. Ce racisme respectable ne se fait pas tant à l’encontre des personnes racisées mais comme de grandes valeurs censées l’émanciper.

Encore aujourd’hui ce racisme respectable parcourt nos organisations de gauche à travers la lutte contre le communautarisme, l’universalisme et la laïcité notamment. Et l’argument de la lutte des femmes voilées en est un bon exemple avec le discours selon lequel les personnes blanches ont le devoir de libérer ces femmes qui subissent les oppressions de leurs maris et de la religion. Ou on se souvient encore du débat qui a animé une partie de l’extrême gauche concernant la camarade voilée qui s’était présentée à des élections. Ces débats étaient si virulents, racistes, islamophobes qu’une partie des camarades raciséEs sont partiEs à ce moment là. On se rend compte alors que ce racisme respectable de gauche qui prend plus la forme de l’islamophobie aujourd’hui n’est pas que l’apanage des organisations réformistes mais touche également les organisations les plus radicales.

Et cela se ressent énormément dans ses actions et dans l’état de la lutte anti-raciste en France. D’une part nos organisations manquent cruellement de personnes racisées dans leurs rangs et d’autre part cela a impact sur la prise en compte justement de ces luttes, qui sont pour le coup, le plus souvent relayées au second plan. On a pu le voir lors de la marche de la dignité qui a été très peu organisée par le NPA par exemple et a montré la division manifeste du milieu anti-raciste, (en partie) conséquence directe du racisme respectable. En effet, l’autonomie des collectifs anti-racistes des organisations de gauche ne date pas d’hier mais d’une série de trahison de la gauche dès 45 et le manque de soutien apporté aux luttes de racisées. On peut parler de la brève du 17 octobre de l’Humanité, la marche de 83, de l’occupation de l’usine de Citroën, etc.

Bon après avoir dit que la gauche était raciste, cela nous dit à peu près ce qu’il ne faut pas faire et pourquoi il faut reconstruire un front anti-raciste en France. Comment on avance stratégiquement dans ce contexte d’amplification des trajectoires autoritaires et racistes des classes dominantes mondiales ? Je vais avancer sur trois éléments basiques que doit comprendre la lutte anti-raciste.

1. Une lutte politique

Le racisme est systémique et institutionnalisé, avoir de simples arguments moraux contre le racisme n’est pas suffisant puisqu’il implique un schéma d’oppressions tirant ses bases matérielles du  capitalisme. Changer simplement les comportements des individus ne permettra pas de le faire disparaître, c’est pourquoi il faut une lutte politique comme réponse au racisme.

2. Une lutte auto-organisée

La meilleure façon de mettre en place cette lutte politique est d’éviter le racisme respectable. Pour cela, il faut qu’elle soit menée par les premières personnes concernées avec leurs propres mots d’ordre notamment parce qu’on pense que l’émancipation des opprimé·e·s doit se faire par elleux.

L’exemple du « Collectif des étudiant-e-s étrangers de Lyon, sans papiers et solidaires » est plutôt intéressant sur la question de l’auto-organisation, de leur analyse sur le rôle de l’État sur la répression qu’ils/elles subissent au quotidien, sur leurs revendications mais également sur la question de la solidarité, etc.

3. Une lutte intersectionnelle

Cependant il ne faut pas oublier que la lutte contre le racisme doit être accompagnée par une lutte anticapitaliste car celle ci n’en serait que partielle. En effet, le racisme étant une oppression liée à la structure sociale d’exploitation qu’est le capitalisme. Le racisme n’existant que par la domination de la classe capitaliste , il ne peut être aboli que par la classe ouvrière unifiée. Il est plus qu’important aujourd’hui que les luttes des migrant·e·s, des sans papiers, des foyers, des jeunes subissant les violences policières soient soutenues par toute la classe justement pour éviter la marginalisation et la victoire partielle de ces luttes comme la grève de la faim de 2008.

C’est pourquoi je pense qu’il ne faut pas tomber dans l’écueil du PIR (Parti des Indigènes de la République) et faire tout un travail de discussions autour du racisme structurel sans pour autant oublier de parler de ses causes. Ça permet d’avoir la tête claire sur ses trajectoires.

A travers trois mots d’ordre :

Plus particulièrement aujourd’hui, dans ce contexte de crise de l’accueil des migrant·e·s, de la répression qu’ils subissent au quotidien avec leurs soutiens, les conditions dans lesquelles il vivent, etc ; nous pousse à poser urgemment comme une de nos priorités la question de l’ouverture des frontières et notre soutien infaillible aux migrant·e·s pour la libre circulation de tou·te·s.

L’inclusion de la lutte contre l’islamophobie est également cruciale pour les raisons évoquées rapidement ultérieurement, notamment parce qu’il est devenu depuis les années 90 une forme de racisme en plein développement et qu’il y a un certain nombre d’enjeux et de raisons pour la classe dirigeante occidentale de la maintenir. De plus, les attaques de plus en plus sexistes / islamophobes à l’encontre des femmes qui portent un voile sont de plus en plus nombreuses depuis la loi de 2004 sur le voile, y compris dans les strates les plus avancées et conscientisées de notre camp social et de certain·e·s camarades.

Le pendant de toutes ces discriminations sont les violences policières à l’encontre généralement des jeunes personnes racisées des quartiers populaires. Elles se multiplient de plus en plus sous cet état d’urgence qui se normalise avec la militarisation de la police, l’augmentation de leurs droits mais surtout la nauséabonde impunité dont elle jouit auprès de la justice. Cette prise de confiance de la police s’explique également à cause du contexte anti-social dans lequel la France évolue et elle se prolonge également à l’encontre des militant·e·s (interdictions de manifestations, perquisitions, fichages, contrôles préalables à l’entrée des manifestations, etc.), des syndicalistes, etc.

Le racisme est présent dans toutes les strates de la société, c’est pourquoi il est important d’y avoir une intervention de manière locale dans les quartiers, dans les facs, les lieux de travail. Mais pour cela, il faut pouvoir prendre en compte les derniers développements du racisme avec pour axes la lutte contre le racisme, contre les mesures sécuritaires (contre les frontières) et en solidarité avec les migrants et les peuples souffrants de l’impérialiste et/ou d’oppressions liées à leur religions, couleurs de peau, leurs cultures, etc. Bien évidemment tout cela doit se faire dans une agitation permanente car si le capitalisme est ce qui fait vivre le racisme, il faut pouvoir combattre toutes les oppressions qui y sont liées car c’est qu’avec le renversement du capitalisme, que le racisme pourra disparaître.

Fatoumata Danso, septembre 2017

Bibliographie

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AMAOUCHE Malika; KATED Yasmine; NICOLAS-TEBOUL Nicolas, Pour une approche matérialiste du racisme, 16 juin 2016, Médiapart : https://blogs.mediapart.fr/malikaamaouchegmailcom/blog/210616/pour-une-approche-materialiste-de-la-question-raciale utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-66

SHAWKI Ahmed, 2012, Black and Red : les mouvements noirs et la gauche américaine, Syllepse

TOSCANO Alberto, De l’aristocratie ouvrière à l’Union sacrée : Du Bois et sur les origines coloniales de 1914,  23 juillet 2014, Revue Période: https://revueperiode.net/de-laristocratie-ouvriere-a-lunion-sacree-du-bois-sur-les-origines-coloniales-de-1914/

GODARD Denis, Réflexions pour « politiser l’antiracisme » à partir de la contribution de Houria Bouteldja, 9 avril 2015, Site NPA, https://npa2009.org/idees/la-gauche-les-indigenes-lantisemitisme

BRAGARD Ambre, Racisme et luttes de classe, 7 février 2011, Revue Que Faire ? : https://quefaire.lautre.net/Racisme-et-lutte-de-classes#nh2