Stratégies pour la libération : anciens et nouveaux arguments de la gauche palestinienne

Article traduit de l’anglais depuis : Strategies for liberation: old and new arguments in the Palestinian left • International Socialism (isj.org.uk).

Après plus de 8 mois de génocide israélien à Gaza, la résistance palestinienne tient toujours bon.1 Aujourd’hui, cette résistance est dominée par des organisations islamistes. La principale force militaire et politique dans la bande de Gaza (et de plus en plus, depuis l’offensive du 7 octobre, en dehors de Gaza) est le mouvement islamiste Hamas.2 Les opérations militaires de sa branche armée, les Brigades Izz ad-Din al-Qassam, sont souvent menées en collaboration avec le deuxième groupe politique le plus important, le Jihad islamique palestinien.3 Bien que des organisations de gauche telles que le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) soient membres de la Salle commune des factions de la résistance palestinienne – formée en 2018 pour coordonner la lutte armée à Gaza – l’influence militaire et politique des courants historiques de la gauche palestinienne est marginale à l’heure actuelle.

Toutefois, cela n’a pas toujours été le cas. Dans les années 1970 et 1980, le FPLP, le plus important parti politique palestinien qui se définissait comme marxiste-léniniste, était à la fois célèbre et tristement célèbre dans le monde entier en raison de ses opérations militantes. L’organisation publiait un journal hebdomadaire en langue arabe, Al-Hadaf (La Cible), ainsi qu’une publication mensuelle en langue anglaise, PFLP Bulletin

Ces deux publications contenaient des analyses et de la théorie politique et traitaient des affaires internationales, des questions sociales et de culture. Le nombre de membres du FPLP était estimé à environ 5 000 pour la seule Jordanie, et près de la moitié d’entre eux étaient des combattants armés.4 L’organisation gérait des hôpitaux, des écoles, des crèches et d’autres services en Jordanie et au Liban. En effet, mon père et des dizaines de milliers d’autres Palestiniens à Gaza et au-delà sympathisaient avec les factions de gauche laïques au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui servait de groupe de coordination pour les factions palestiniennes. Ces groupes de gauche entretenaient des liens étroits avec la diaspora palestinienne, les partis communistes et les organisations politiques du monde entier.

Dans cet article, je soutiens que les raisons du déclin des organisations historiques de la gauche palestinienne résident principalement dans la priorité accordée aux stratégies militaires, qui les a rendues dépendantes des structures de l’OLP. La concurrence bureaucratique entre les factions de l’OLP pour le financement et le soutien des régimes de la région a réduit l’espace d’organisation susceptible de libérer l’énergie créatrice des gens ordinaires par la lutte par en bas. La domination des conceptions staliniennes d’une révolution par « étapes », où la lutte nationale prendrait toujours le pas sur la lutte pour la libération sociale de l’exploitation et de l’oppression, a étouffé la dynamique révolutionnaire de la lutte palestinienne.

Aujourd’hui, les questions de stratégie sont revenues à la surface en raison des révolutions et contre-révolutions arabes depuis 2011, de l’escalade militaire dramatique au Moyen-Orient depuis l’offensive menée par le Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, de la réponse brutale d’Israël et des échos de tout cela dans le mouvement croissant de solidarité avec la Palestine dans les pays occidentaux. Une nouvelle gauche palestinienne se développe, en particulier dans la diaspora, avec des formations telles que le Palestinian Youth Movement qui joue un rôle dans la formation de courants radicaux dans le mouvement de solidarité.

Pour les socialistes révolutionnaires, les Palestiniens ont toujours eu – et continuent d’avoir – le droit de résister, par tous les moyens nécessaires, à la colonie sioniste soutenue par l’impérialisme qui occupe leur terre et les opprime. Ils doivent bénéficier de notre soutien inconditionnel lorsqu’ils luttent pour la liberté. Cependant, notre solidarité avec la lutte d’un peuple opprimé n’empêche pas la nécessité d’une critique des tactiques et des stratégies employées par les organisations palestiniennes.5 Revisiter l’histoire et les débats controversés au sein de la gauche palestinienne peut constituer une ressource vitale, nous aidant à comprendre les leçons du passé et à développer une stratégie de libération du colonialisme sioniste aujourd’hui.

Origines de la gauche palestinienne

Dans les années 1950, une nouvelle sorte de nationalisme arabe au Moyen-Orient et en Afrique du Nord a vu sa popularité exploser. Cette idéologie considérait les Arabes comme un seul peuple (« qawm » en arabe) qui avait été divisé par les frontières artificiellement imposées à l’époque coloniale. En 1952 et 1958, respectivement, de jeunes officiers militaires égyptiens et irakiens ont renversé leurs monarchies soutenues par les Britanniques, et le dirigeant égyptien Gamal Abdel Nasser s’est imposé comme le champion du nationalisme arabe. Nasser a lancé un défi politique et économique aux anciennes puissances impérialistes, la Grande-Bretagne et la France, en nationalisant le canal de Suez en 1956. Ces développements ont alimenté l’idée que l’« unité arabe » pouvait être créée par l’action de nationalistes radicaux à la tête de l’État. En 1958, l’Égypte et la Syrie ont accepté la première grande fusion d’États arabes, la République arabe unie. La libération de la Palestine a été présentée comme une cause centrale du nationalisme arabe, de nombreux Palestiniens attendant de Nasser qu’il s’oppose à Israël.6

La gauche palestinienne est née d’une double crise de ce nationalisme arabe. Le premier moment de crise s’est produit en 1961, lorsque l’État syrien s’est séparé de la République arabe unie, qui avait été créée trois ans auparavant. Le second moment de crise, plus grave, s’est déroulé avec la défaite dévastatrice des armées arabes face à Israël lors de la guerre des Six Jours en 1967. L’échec militaire de l’Égypte, de la Jordanie et de la Syrie a remis en question la doctrine selon laquelle l’unité arabe libérerait la Palestine. C’est à ce moment-là que les idéologies nationalistes de gauche, qualifiées de « marxistes », ont commencé à concurrencer le nassérisme au sein du Mouvement nationaliste arabe (MNA), une organisation panarabe fondée par un groupe d’étudiants palestiniens de l’Université américaine de Beyrouth à la suite de la Nakba (« catastrophe ») – l’expulsion forcée de quelque 750 000 personnes par l’État d’Israël nouvellement créé, en 1948.

Selon le sociologue palestinien Jamil Hilal, les critiques de gauche du nassérisme se tournaient vers « tout ce qui était disponible sur le marché ».7 Les idéologies les plus populaires sur le « marché » de l’époque étaient celles qui dominaient les luttes de libération nationale en Algérie et au Viêt Nam, pour lesquelles de nombreux Palestiniens avaient un grand respect. Les textes des figures de proue des luttes anticoloniales, telles que Mao Zedong, Che Guevara et Ho Chi Minh, étaient largement lus et discutés. Dans ce contexte, la théorie stalinienne des étapes a gagné en influence dans la gauche palestinienne. Selon cette théorie, le rôle des communistes dans les luttes de libération nationale était de soutenir le projet de la classe capitaliste indigène de construire un État-nation et d’éviter soigneusement de risquer la rupture des alliances avec les capitalistes en s’abstenant de promouvoir une révolution sociale contre le capitalisme. L’indépendance nationale devait être atteinte avant que le socialisme puisse être mis à l’ordre du jour ; une première étape, la révolution bourgeoise, devait être achevée avant qu’une deuxième étape, la révolution socialiste, ne puisse être entamée.

Parmi les personnes intéressées par ce modèle de libération nationale se trouvaient deux fondateurs du MNA : George Habash, un Palestinien ayant vécu le nettoyage ethnique à Lydda pendant la Nakba, et Wadie Haddad, qui avait été expulsé de Safad en 1948. Tous deux étaient de jeunes médecins panarabistes et dirigeaient ensemble une clinique médicale à Amman, en Jordanie. Ils ont contribué à transformer la section palestinienne du MNA en FPLP, en fusionnant avec le Front de libération de la Palestine et d’autres groupes de « fedayins ».8

L’OLP, en revanche, a d’abord été créée comme un produit et un outil de Nasser dans un contexte de rivalités régionales en 1964. Toutefois, la situation a changé avec la défaite militaire de Nasser lors de la guerre des six jours et l’opération de guérilla étonnamment réussie contre l’armée israélienne en Jordanie lors de la bataille de Karameh par le Fatah, un groupe de guérilla palestinien.9 Le Fatah a ensuite pris le contrôle de l’OLP, l’a transformée en un mouvement de masse et l’a rendu plus indépendante du Caire. Les nouveaux groupes de gauche, dont les dirigeants avaient auparavant rejeté l’OLP, l’ont rejointe.

Par conséquent, l’OLP de cette période se composait d’une série de factions de résistance armée à l’idéologie laïque. Le Fatah était la plus importante et existait depuis les années 1950, bien qu’il n’ait commencé ses opérations militaires qu’en 1965. Sa politique était fondée sur une forme de nationalisme « watani » qui défendait une identité nationale palestinienne partagée, distincte du projet nationaliste panarabe « qawmi ».10 Le nationalisme du Fatah visait à représenter toutes les classes sociales palestiniennes, ce qui plaisait à la classe capitaliste palestinienne, qui avait besoin d’un mouvement de masse pour mener sa lutte en faveur de la création d’un État-nation palestinien, mais qui cherchait également à éviter de mettre en péril ses alliances avec les États capitalistes arabes existants. Le Fatah est devenu le parti de la bourgeoisie palestinienne. Les figures de proue du Fatah, ainsi que ses concurrents de gauche au sein de la nouvelle OLP, sont issues de la classe moyenne et de l’intelligentsia palestiniennes exilées dans les États arabes.

Le Fatah a tenté de se lier à une politique de non-ingérence dans les affaires des États arabes, rejetant l’idée de s’impliquer dans les luttes politiques au sein d’autres pays arabes.  En revanche, le FPLP considérait l’ingérence comme essentielle. Cependant, il n’a pas réussi à rompre totalement avec son passé panarabiste et son concept d’ingérence ne visait pas les révolutions ouvrières et la destruction des machines d’État capitalistes. Les conceptions idéologiques et organisationnelles du FPLP suivaient l’exemple des mouvements de libération nationale du tiers-monde, dont les intellectuels radicaux s’orientaient vers les modèles chinois et soviétiques de capitalisme d’État comme méthode de création de la croissance économique et de l’indépendance. L’organisation a continué à considérer que la libération nationale nécessitait le soutien des gouvernements arabes à la résistance palestinienne. C’est ce que Habash, le premier secrétaire général du FPLP, entendait lorsqu’il reprenait le slogan panarabiste initialement formulé par le président de l’OLP, Ahmad Shukeiri : « La route vers la Palestine passe par Amman, par Beyrouth, par Le Caire et par Riyad ».11 Lorsque les socialistes révolutionnaires reprennent le même slogan, il est investi d’une signification très différente, à savoir que les luttes révolutionnaires des travailleurs et des populations appauvries dans les pays entourant la Palestine sont essentielles à la victoire de la révolution palestinienne.

Le prix de la dépendance

L’OLP utilisait des tactiques de la guerre asymétrique pour affronter son puissant ennemi israélien. Cependant, les risques étaient énormes pour ceux qui menaient la lutte dévouée (et souvent nécessairement clandestine) de la résistance souterraine contre un ennemi militairement supérieur. Avec la victoire d’Israël sur le nationalisme arabe lors de la guerre des six jours, l’État colonisateur est devenu le chien de garde de l’impérialisme américain dans la région. Les dirigeants politiques palestiniens risquaient d’être assassinés ou emprisonnés à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine, et leurs organisations furent criminalisées par Israël et l’Occident.

Après sa rupture avec Nasser, l’OLP a accepté le soutien de nouveaux acteurs étatiques, allant des monarchies du Golfe à l’Algérie postcoloniale, en passant par le Viêt Nam et Cuba. L’organisation a tenté de prospérer financièrement, militairement et diplomatiquement en s’appuyant sur la rivalité inter-impérialiste entre Washington et Moscou pendant la guerre froide, ainsi que sur les rivalités régionales entre les régimes arabes.

L’aile gauche de l’OLP n’a pas fait exception à la règle du parrainage extérieur par des acteurs étatiques. Omar Mostafa note :

[Bien] qu’il ait rejeté, à juste titre, l’idée que certains régimes arabes étaient socialistes, le FPLP a fait une fausse distinction entre les régimes réactionnaires qui s’accommodaient de l’impérialisme et les régimes nationalistes progressistes qui étaient obligés de lutter contre lui. Sur la base de cette distinction, le FPLP s’est allié à un certain nombre de gouvernements arabes répressifs, tels que le régime baasiste en Irak et le régime d’Assad en Syrie.12

Le FPLP était la plus grande faction de l’OLP à gauche du Fatah, mais il n’était pas le seul. A l’origine, le Front populaire démocratique pour la libération de la Palestine a été formé après une scission de gauche par d’anciens membres du MNA et du FPLP, s’organisant en tant qu’« aile progressiste » autour du magazine Al-Hurriyya (« Liberté »). En 1969, il fait sécession du FPLP sur la base d’un rejet de la théorie différenciant les États arabes réactionnaires et progressistes, et l’organisation adopte officiellement le nom de Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP) en 1975. Ses critiques à l’égard du FPLP remettaient également en question son approche militaire, plaidant initialement pour une transition vers une véritable « guerre populaire » de libération en suscitant « une conscience politique fondamentale » parmi les masses.13 Cependant, le FDLP n’a pas réussi à rester financièrement indépendant des régimes arabes qu’il rejetait théoriquement. Mamdouh Nofal, ancien trésorier du FDLP, a affirmé dans une interview à Al Jazeera que « le FDLP a reçu 1 million de dollars par mois de la Libye, le FPLP plus d’un million de dollars, et le commandement général [du FPLP] 1,5 million de dollars au cours de la période allant de 1978 à 1980 ».14

Bien que le FDLP ait commencé par être une scission de gauche du FPLP, rejetant la théorie des « régimes arabes progressistes » tout en s’accrochant à d’autres faiblesses telles que la théorie des étapes, il a opéré un brusque virage à droite à la suite de la crise à laquelle l’OLP a été confrontée en Jordanie en 1970, lorsque la monarchie jordanienne a mené une guerre civile brutale contre elle. En 1973, quelques années seulement après avoir évoqué son intention de former des soviets, le FDLP a lancé un programme intitulé « Politique des phases », qui plaidait en faveur d’une « autorité nationale combattante indépendante », c’est-à-dire d’un mini-État palestinien à Gaza et en Cisjordanie. L’année suivante, lors du Conseil national palestinien, ce précurseur de la « solution à deux États » a été adopté par le chef du Fatah et de l’OLP, Yasser Arafat.

Les reculs politiques du FDLP et du Fatah sur cette question étaient des réactions tragiques et erronées à la grave défaite infligée au mouvement national palestinien par les événements de Jordanie en 1970. La position des Etats de la région à l’égard du mouvement national palestinien est restée contradictoire. L’Arabie saoudite et le Koweït prétendaient soutenir l’OLP, mais ils subventionnaient simultanément la monarchie jordanienne qui commençait à intensifier ses attaques contre les organisations palestiniennes.15 Malgré les signes d’instabilité du régime jordanien et les appels des partis palestiniens de gauche en Jordanie à mettre fin au règne réactionnaire du roi Hussein, aucune de ces organisations ne s’est sérieusement préparée à l’éventualité d’un soulèvement révolutionnaire contre la monarchie en 1969-70. La mobilisation de milliers de Palestiniens et de Jordaniens dans un mouvement de masse contre la monarchie aurait pu prévenir la menace imminente de l’expulsion des guérilleros palestiniens de Jordanie et ouvrir la voie à la libération de la Palestine. Pourtant, au lieu de s’ancrer dans la classe ouvrière palestinienne et jordanienne, le FPLP s’est concentré sur le détournement d’avions, prenant le contrôle d’un certain nombre d’avions de ligne occidentaux et les faisant atterrir en Jordanie en septembre 1970.

Lorsque le régime jordanien a lancé sa répression contre l’OLP, la justifiant comme une réaction aux détournements d’avions, aucune des forces palestiniennes n’était prête. Toujours soucieux de ne pas froisser leurs confrères de la classe dirigeante arabe, les dirigeants du Fatah ont accepté des trêves au milieu des bombardements, ce qui a simplement permis au roi Hussein de renforcer la discipline au sein de son armée. Il n’y a eu aucune tentative sérieuse de tourner les rangs de l’armée contre ses dirigeants impopulaires. Après des mois de va-et-vient, la guérilla palestinienne a été vaincue et chassée de Jordanie lors de ce qu’on appelle depuis « Septembre noir ».16 Les dirigeants arabes prétendument plus « radicaux » ne sont pas venus en aide aux Palestiniens. Chris Harman, relatant le bombardement jordanien de la résistance palestinienne, a déclaré : « Pendant ce temps, Nasser, longtemps autoproclamé “leader de la révolution arabe”, se tient à l’écart en espérant que le roi gagnera ».17 Hafez al-Assad, le dictateur Syrien, adopta la même position et resta passif.

Malgré le soutien diplomatique et militaire de Staline à la création de l’État d’Israël, l’Union soviétique devint une référence clé pour l’OLP. En 1970, l’Union soviétique fournit non seulement de l’argent et des informations, mais aussi des formations militaires, des lance-roquettes, des mines et des missiles. Les armes étaient en particulier acheminées vers les combattants du FPLP. L’attrait du FPLP pour l’Union Soviétique ne se limita pas à la réception de prestations matérielles ; il impliqua aussi l’adoption de concepts organisationnels comme un comité central fondé sur l’interprétation stalinienne du « centralisme démocratique ». Dans la pratique, ce modèle d’organisation stalinien équivalait à un centralisme bureaucratique et sapait la démocratie interne.

En effet, l’Union soviétique visait à transformer les organisations qui lui étaient liées en instruments loyaux de ses propres objectifs de politique étrangère. Un rapport des services secrets soviétiques expose ouvertement les intentions qui sous-tendent le soutien à la guérilla du FPLP : « La nature de nos relations avec Haddad nous permet d’exercer un certain contrôle sur les activités de la section des opérations extérieures du FPLP [ce qui nous permet] d’exercer une influence favorable à l’Union soviétique – et aussi d’atteindre certains de nos propres objectifs par le biais des activités du FPLP tout en observant le secret nécessaire ».18 La dépendance à l’égard de l’Union soviétique signifiait au moins un certain degré d’obéissance à ses instructions et à ses impératifs idéologiques.

Les limites d’une stratégie militaire de libération nationale

S’inspirant du guévarisme, les forces de gauche au sein de l’OLP mettaient l’accent sur la lutte armée et le volontarisme révolutionnaire. Leila Khaled, cadre du FPLP et l’une des pirates de l’air de septembre 1970, a repris dans son autobiographie les célèbres paroles de Guevara sur la tâche des révolutionnaires : « Nous agissons en tant que révolutionnaires pour inspirer les masses et déclencher le bouleversement révolutionnaire à une époque de contre-révolution ».19 L’idée exprimée ici est que la volonté révolutionnaire des individus peut transformer une phase contre-révolutionnaire en une phase révolutionnaire. La résistance armée était considérée comme le moyen de parvenir à la révolution. Khaled imagine une stratégie de libération de la Palestine basée sur l’exemple de la lutte armée dans d’autres contextes coloniaux : « Nous devons apprendre à imiter nos frères algériens ». De même, le FPLP affirmait que le Front de libération nationale vietnamien « a prouvé que ce n’est qu’avec une formule » de guérilla populaire que « nous sommes capables de faire face à l’impérialisme et à sa supériorité technologique, économique et militaire ».20

De nombreuses forces au sein de la gauche palestinienne ont rejeté à juste titre la logique du Fatah de fausse diplomatie, de concessions politiques et de cycles de négociations infructueux avec la puissance coloniale israélienne. Ghassan Kanafani, romancier et membre éminent du FPLP, a décrit ces pourparlers inégaux comme une « conversation entre l’épée et le cou ».21 Toutefois, comme Jabra Nicola, un important socialiste révolutionnaire palestinien, l’a fait remarquer à juste titre, l’accent mis presque exclusivement sur une stratégie militaire signifiait que les critiques de gauche du Fatah s’abstenaient de s’impliquer dans les luttes d’en bas menées par les organisations palestiniennes de base.22 La résistance armée s’est substituée au projet de participation des masses au processus d’émancipation nationale. Dans un article intitulé « Thèses sur la révolution dans l’Orient arabe », Jabra, écrivant sous le pseudonyme de « A Said », résume sa compréhension des « raisons de la défaite palestinienne » :

1. L’incapacité des dirigeants à reconnaître, en théorie et en pratique, la portée régionale (tout l’Orient arabe) de la révolution ; la séparation de la lutte pour la « libération de la Palestine » de la lutte contre tous les régimes arabes pour une révolution socialiste prolétarienne dans l’ensemble de l’Orient arabe, qui seule peut vaincre l’impérialisme et l’Etat sioniste d’Israël.

2. L’adoption de la théorie de la « révolution par étapes » et de la théorie des « contradictions primaires et secondaires », subordonnant la lutte des classes pendant « une certaine période » à l’« unité nationale », et considérant ainsi les régimes arabes et les classes dirigeantes arabes comme des alliés dans la lutte contre l’impérialisme et la lutte contre Israël, et non comme des ennemis de classe contre lesquels il faut lutter et qu’il faut renverser.

3. Son acceptation de la théorie du « focus », qui met presque exclusivement l’accent sur l’aspect militaire de la lutte, et son refus de reconnaître la nécessité d’une organisation d’avant-garde révolutionnaire panarabe et [la nécessité de] subordonner les opérations militaires à la stratégie politique et à la direction politique. Ainsi, il n’a fait aucun effort pour politiser les masses dans les différents pays arabes et les mobiliser pour une lutte révolutionnaire, non seulement pour la « libération de la Palestine », mais pour la libération de tout l’Orient arabe de la domination impérialiste et des dirigeants et régimes arabes à travers lesquels [l’impérialisme] domine. Son insistance sur la séparation de la lutte palestinienne de la lutte locale dans les pays arabes l’a conduit à adopter une telle politique vis-à-vis des masses arabes qu’elle a même démoralisé et contrarié les masses jordaniennes et libanaises au sein desquelles elle agissait et avait sa base.23

La logique de leur focalisation sur la guérilla a conduit les forces de gauche au sein de l’OLP à rivaliser avec le Fatah sur le plan militaire en organisant des opérations armées toujours plus spectaculaires. Cependant, même l’aile militairement la plus radicale du nationalisme révolutionnaire considérait l’activité des masses comme un simple outil de construction d’un État-nation, au lieu de voir la possibilité pour les gens ordinaires d’accomplir leur propre émancipation en prenant le contrôle des moyens de production. En effet, cette attitude peut être décelée dans le document fondateur du FPLP de 1967, qui appelait les masses à remplir leur rôle de catalyseur de la résistance armée :

Les masses (ô fils de notre peuple héroïque !) sont le souffle vital des combattants, et c’est l’implication des masses dans la bataille qui assure la victoire à long terme. Le soutien populaire aux militants à tous les niveaux et dans tous les pays constitue la base d’une lutte authentique, ferme et croissante et d’une fermeté qui s’accroît jusqu’à l’écrasement de l’ennemi.24

Selon cette perspective, l’activité de masse sert de condition favorable à l’action d’un petit groupe de militants. Plutôt que de développer leur propre capacité d’auto-organisation révolutionnaire, les travailleurs sont censés agir principalement en tant que soutien aux opérations militaires des organisations de guérilla.

Du fusil au rameau d’olivier

Après la défaite des factions armées palestiniennes en Jordanie par les forces du roi Hussein en septembre 1970, l’OLP a été contrainte de quitter le pays et de s’installer au Liban, où elle s’est rapidement retrouvée au cœur de la guerre civile libanaise. Celle-ci s’est avérée être un point clé dans le développement de la gauche palestinienne. Pendant son séjour au Liban, l’OLP a formé une entité quasi-étatique, ce qui a conduit à la bureaucratisation et à l’institutionnalisation de ses factions, y compris  de celles de gauche.25 Cela a affecté le FPLP, qui a également reçu des fonds par l’intermédiaire de l’OLP. L’activisme politique a fait l’objet d’une « professionnalisation », les structures bureaucratiques se développant et augmentant leur dépendance matérielle à l’égard des fonds de l’OLP et des États qui la parrainent. Cette bureaucratisation « influençait tacitement l’action du FPLP et représentait un obstacle au changement », car tout changement de ce type « mettrait en péril les positions établies au sein de l’organisation » :

En outre, la structure bureaucratique représentait également un instrument à la disposition de la direction pour exercer un contrôle plus fort sur les membres de la faction. Par conséquent, la nécessité pour le FPLP de maintenir son intégration au sein des institutions de l’OLP et la bureaucratisation de sa structure… ont favorisé une approche conservatrice au sein de la direction du FPLP.26

La corruption généralisée de l’OLP a affecté ses courants de gauche par le biais du système de répartition des fonds entre les factions, qui a également institutionnalisé la concurrence entre elles pour l’obtention de fonds de la part des États donateurs. En fin de compte, le comité exécutif de l’OLP contrôlait le budget de l’organisation, et la prise de décision et le contrôle budgétaire étaient de plus en plus consolidés sous la direction de Yasser Arafat du Fatah, qui s’en servait comme d’un outil d’influence politique. Le FPLP a quitté le comité exécutif en réponse aux premiers pas de l’OLP vers l’adoption d’une solution à deux États, le « Programme en dix points » de 1974, mais il l’a réintégré sept ans plus tard. L’érosion de la démocratie interne au sein de l’OLP s’est reflétée dans la Fédération générale palestinienne des syndicats, au sein de laquelle les élections internes ont pris fin après 1981, son exécutif étant choisi par le parti. Le Fatah disposait de six des sièges disponibles, trois étaient attribués au FPLP et les autres partis de gauche se répartissaient les trois sièges restants.

Au cours des années 1980, les journaux indépendants, qui avaient été auparavant d’importants vecteurs d’autonomie pour l’aile gauche de l’OLP, ont également perdu de leur poids. Le FPLP Bulletin en anglais a cessé de paraître en 1984. Il a été remplacé par une publication bimestrielle, Democratic Palestine, mais celle-ci n’a pas survécu une décennie. Après le transfert de son siège en Syrie en 1986, l’hebdomadaire du FPLP, Al-Hadaf, est soumis à la censure du régime Assad.27

La direction de l’OLP opérait toujours en exil et n’était pas impliquée de manière substantielle dans les activités en Palestine occupée. Le siège du FPLP s’est installé à Damas en 1982, le régime d’Assad devenant « son principal partenaire régional ».28 Avant le milieu des années 1970, lorsque les factions de gauche de l’OLP ont commencé à jouer un rôle en Palestine occupée, la seule faction de l’OLP qui y était présente était le minuscule Parti communiste palestinien.29

En 1987, le déclenchement de la première Intifada a attiré l’attention sur la bande de Gaza et la Cisjordanie occupées.30 Les Palestiniens ont résisté à l’occupation israélienne par des mobilisations de masse, des grèves générales et des organisations de base qui ont fasciné les gens ordinaires dans le monde entier. Des comités auto-organisés ont organisé des manifestations, des grèves et une résistance physique aux forces d’occupation israéliennes, et ont mis en place des systèmes de santé et d’éducation clandestins. Le rôle de ces comités populaires a été célébré par certains éléments de la direction du mouvement palestinien sur le terrain à Gaza et en Cisjordanie. Dans un communiqué publié le 28 mai 1988, la direction nationale unifiée du soulèvement a exhorté les Palestiniens à « construire l’appareil d’auto-gouvernement du peuple par le biais des comités populaires ».31 Une potentielle alternative à l’idée que l’OLP se faisait d’elle-même en tant que « seul représentant » du peuple palestinien était en train d’émerger, même si la gauche n’était pas bien ancrée dans le soulèvement.

Il est évident qu’une OLP dirigée par le Fatah résisterait à cette évolution. Le risque d’être remplacé par la direction alternative émergeant de la base à Gaza et en Cisjordanie a poussé Arafat à poursuivre les négociations avec Israël et les États-Unis. Cela aurait pu être un moment décisif pour une alternative révolutionnaire de gauche. Cependant, bien que le FPLP ait été en mesure d’établir une présence populaire en Palestine occupée par le biais d’une organisation clandestine, sa direction bureaucratisée en exil est restée liée à l’OLP. Il a donc adopté une position ambiguë à l’égard de la politique d’Arafat, ce qui l’a éloigné de sa base à Gaza et en Cisjordanie.

Les énergies révolutionnaires de la première Intifada n’ont pas seulement été étouffées par les tendances bureaucratiques du Fatah à la collaboration et au compromis. La fragmentation historique de la classe ouvrière palestinienne  par le colonialisme israélien et le déplacement de millions de Palestiniens ont également joué un rôle essentiel dans la défaite du soulèvement.32 Les grèves et les mobilisations de masse à la base ont causé de graves problèmes à la classe dirigeante israélienne, générant des crises militaires et politiques. Toutefois, ces luttes n’ont pas réussi à paralyser et à fracturer l’État israélien  qui a continué à fonctionner grâce à la volonté des Israéliens juifs de remplacer la main-d’œuvre palestinienne et à l’aide militaire et économique continue des États-Unis.

À partir du milieu des années 1990, la formation de l’Autorité palestinienne en tant que sous-traitant de l’occupation par les accords d’Oslo a conduit à la consolidation et à l’institutionnalisation du processus de normalisation entre l’OLP et Israël. Dans leurs annonces, le FPLP et le FDLP étaient tous deux opposés à Oslo dès le départ, et le FPLP a même initié et dirigé une alliance « Front du refus » contre les accords d’Oslo, à laquelle s’est joint le FDLP. Cependant, la dépendance des structures du FPLP à l’égard de l’OLP les a laissés mal équipés – sur le plan idéologique, organisationnel et financier – pour mettre en œuvre leur position de rejet.

Le Hamas est apparu comme un nouveau concurrent pour le leadership palestinien en dehors du cadre de l’OLP. Entre 1988 et 1989, le FPLP enregistrait encore une croissance massive de ses effectifs, mais celle-ci s’est considérablement ralentie en 1991. Un an plus tard, la croissance s’est complètement arrêtée. Un certain nombre de membres du FPLP sont passés au Hamas, qu’ils considéraient comme la nouvelle organisation en devenir.33 La popularité du FPLP est tombée à 3 % en 1995, lorsque les dirigeants de l’OLP, après avoir entamé de nouveaux cycles de négociations avec Israël, ont signé l’accord de Taba, également connu sous le nom d’« Oslo 2 ».34 En 2006, selon le Palestinian Center for Policy and Survey Research, le soutien global au Hamas parmi les électeurs palestiniens s’élevait à 38,6 %, contre 42,1 % pour le Fatah.35 Le même sondage révélait que le FPLP ne recevait que 4,4 %, tandis que le FDLP avait 1,2 %. Le sondage le plus récent du Palestinian Center for Policy and Survey Research, réalisé en décembre 2023, a révélé que le Hamas était soutenu à 43 %, le Fatah à 17 % et le FPLP à seulement 1 %.36

Aucune des factions de gauche de l’OLP n’a été considérée comme une alternative cohérente et indépendante au Fatah par une grande partie des masses palestiniennes, les partis islamistes comblant le vide.

La gauche palestinienne post-Oslo n’a pas réussi à se remettre de sa chute au cours des dernières décennies. Néanmoins, les questions stratégiques et politiques soulevées par son essor et son déclin continuent de jouer un rôle dans la politique contemporaine de la Palestine. Aujourd’hui, les principales forces de résistance nationale s’identifient largement à l’islam politique, mais le mouvement de libération palestinien est toujours confronté à des défis similaires à ceux rencontrés par les factions nationalistes laïques et de gauche de l’OLP entre les années 1960 et le début des années 1990, y compris les questions de la dépendance de la résistance à l’égard d’une logique militaire et de sa dépendance à l’égard des États régionaux qui la soutiennent.

Au cours des dernières décennies, l’Iran est devenu le principal État soutenant les combattants de la résistance palestinienne. Comme indiqué précédemment, le FPLP et le FDLP à Gaza sont membres de la Salle commune des factions de la résistance palestinienne, qui fait partie de l’Axe de la résistance dirigé par l’Iran, une coalition politique et militaire informelle formée par l’Iran avec ses alliés et ses mandataires au Moyen-Orient. Avant d’être assassiné par l’Autorité palestinienne, Nizar Banat, intellectuel populaire de gauche, a posé une question rhétorique dans l’une de ses vidéos : « Où avez-vous trouvé les roquettes qui protègent Gaza ? »37 Son argument, adressé aux factions non islamistes, était que les Palestiniens devraient être reconnaissants à l’Iran de fournir des armes à toutes les forces de résistance.

Toutefois, comme toujours, le soutien de l’Iran à la résistance est assorti de conditions. Lorsque le Hamas a refusé d’apporter un soutien inconditionnel à la dictature d’Assad, soutenue par l’Iran, pendant la révolution syrienne, l’Iran a réduit son soutien financier de 150 millions de dollars à moins de 75 millions de dollars. Lorsque le Jihad islamique palestinien a refusé d’exprimer sa solidarité avec le mouvement Houthi soutenu par l’Iran au Yémen, ses fonds ont été réduits en conséquence et redirigés vers le mouvement Sabireen, une organisation chiite gazaouie aujourd’hui disparue. En fin de compte, le Jihad islamique a obtempéré.38

Ces dernières années, la direction du Hamas en exil au Qatar a également montré des signes de volonté de suivre la voie déjà tracée par le Fatah et la direction historique de l’OLP : un accommodement avec les puissances occidentales et le système étatique international. En 2017, cela s’est traduit par une modification de la charte du Hamas, le document fondateur du groupe, afin d’en supprimer les termes qui excluraient une solution à deux États. La charte révisée de 2017 a également accepté l’existence d’un État palestinien dans les frontières de 1967 des territoires palestiniens occupés.39 En outre, les responsables du Hamas ont réitéré leur engagement en faveur d’un compromis « temporaire » sur deux États en avril 2024.40

Le Hamas reste une organisation déchirée par un certain nombre de contradictions politiques internes et de classe. Néanmoins, la base de son parti et de son aile militaire à Gaza sont déterminées à poursuivre la résistance. La résilience de sa base politique et de son organisation militaire, malgré l’ampleur de l’assaut israélien meurtrier, a surpris les ennemis du Hamas comme ses partisans.

Échos dans la diaspora

De vieux arguments sur les stratégies de libération sont réapparus alors que le mouvement international de solidarité avec la Palestine a pris une ampleur inimaginable à la suite de l’offensive du Hamas le 7 octobre et de l’invasion génocidaire de Gaza par les Israéliens.

En raison du nettoyage ethnique répété de la Palestine depuis 1948, les communautés de la diaspora palestinienne se composent de millions de personnes à travers le monde. Ces communautés diffèrent par leur composition sociale, leur lieu d’origine et les pays qu’elles ont fuis. En conséquence, elles ont toutes une expérience concrète différente des défis historiques et contemporains auxquels sont confrontés les Palestiniens à Gaza, en Cisjordanie, en « Palestine de 1948 » (c’est-à-dire la zone officiellement revendiquée par Israël depuis la Nakba), en Jordanie, au Liban, en Syrie, dans les États du Golfe et dans d’autres régions du Moyen-Orient. Les controverses et les conflits concernant les positions sur le Hamas et l’OLP, les révolutions arabes et les contre-révolutions qui ont suivi, ainsi que les stratégies de libération nationale palestinienne, éclatent fréquemment au sein des communautés de la diaspora et du mouvement de solidarité.

Cela n’a rien de surprenant. Les communautés en exil abritent des reliques, mais elles sont également marquées par des contrastes internes. Les anciennes structures de l’OLP ont survécu en Occident et les communautés diasporiques sont souvent dirigées par des membres exilés de la classe capitaliste ou par des cadres de longue date du parti. Certaines entretiennent des relations diplomatiques et financières avec les États arabes affiliés à leurs partis politiques respectifs. À certains égards, les structures politiques diasporiques ressemblent à des modèles miniatures de l’OLP. Les formations politiques en exil étant actives depuis des décennies, nombre d’entre elles ont conservé des caractéristiques qui jouaient un rôle plus important avant l’émergence du Hamas et la création de l’Autorité palestinienne. Certaines considèrent toujours l’OLP comme « l’unique représentant du peuple palestinien » – comme l’appellent les Nations unies et la Ligue arabe – et se considèrent donc comme les seuls représentants de leurs diasporas palestiniennes respectives. Pourtant, nombre de ces structures politiques en exil sont confrontées à des problèmes de reproduction de leurs organisations, et perdent parfois même leurs propres descendants, qui sont incapables de s’identifier à ces groupes hérités au-delà d’un niveau abstrait.

De nouvelles formations prometteuses de la diaspora palestinienne ont vu le jour ces dernières années, notamment lors du mouvement Black Lives Matter en 2020 et après la vague de solidarité lorsque les Palestiniens ont résisté à l’expulsion et au nettoyage ethnique dans le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem. Le mouvement de la jeunesse palestinienne aux États-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne et Palästina Spricht (Palestine parle) en Allemagne en sont des exemples. En général, ces structures politiques ont été créées par les deuxième et troisième générations de Palestiniens de la diaspora. Les positions politiques adoptées par les militants au sein de ces groupes sur la base d’une notion non définie de l’identité palestinienne sont nécessairement diverses. Par exemple, le Palestinian Youth Movement déclare : « Indépendamment de nos différents antécédents politiques, culturels et sociaux, nous nous efforçons de faire revivre une tradition d’engagement pluraliste envers notre cause ».41 L’indépendance de l’organisation et sa non-affiliation à un parti palestinien sont soulignées dans sa présentation publique, comme le sont ses efforts pour reconstruire un mouvement de libération palestinienne en s’engageant dans des luttes aux côtés d’autres groupes opprimés. Son site web, par exemple, documente ses mobilisations en solidarité avec ceux qui protestent contre le Dakota Access Pipeline et ses tentatives d’établir des liens entre la lutte palestinienne et les expériences de génocide et d’oppression des peuples indigènes d’Amérique du Nord.

Comme dans d’autres groupes de jeunes activistes, le pourcentage d’étudiants est généralement élevé. Nombre de ces militants palestiniens ont été socialisés en tant que citoyens migrants dans les pays occidentaux avant de s’organiser politiquement en tant que Palestiniens. D’autres, actifs dans ces groupes, n’ont émigré en Occident que récemment, fuyant, par exemple, la guerre civile syrienne et la destruction du camp de réfugiés palestinien de Yarmouk. La question de l’affiliation de la résistance palestinienne à des États nationaux revêt une dimension concrète pour les militants qui ont vu le commandement général du FPLP sévir dans ce camp pour défendre le régime d’Assad.

Naturellement, des défis sur d’autres questions se posent également dans ces formations, y compris des visions concurrentes pour une Palestine libre et des pressions vers des formes de séparatisme basées sur une notion floue de l’identité palestinienne. En outre, les militants palestiniens les plus clairvoyants ont déjà compris que même s’ils parvenaient à organiser l’ensemble de leur communauté dans un pays impérialiste donné, cela ne suffirait pas à affaiblir de manière substantielle le soutien de cet État à Israël.

Dans ces contextes, des discussions sur les tactiques de front uni ont tendance à émerger. Il est tout à fait compréhensible, étant donné les trahisons historiques expliquées ci-dessus, que les militants palestiniens craignent largement ce que l’on appelle la « normalisation » : l’établissement de relations avec les sionistes et l’occupation. Lorsque l’on tente d’élargir le mouvement de solidarité, on discute de la manière de différencier les tactiques de front uni visant à atteindre la base des organisations de la classe ouvrière et les activités qui normalisent la trahison de la cause palestinienne.

L’un des débats les plus urgents auxquels les socialistes sont confrontés dans le cadre des mobilisations de masse contre le génocide israélien à Gaza est celui des relations avec les autres mouvements et luttes, en particulier le mouvement ouvrier. Ces derniers mois, des actions inspirantes ont été menées par les travailleurs pour stopper les livraisons d’armes à Israël. Les manifestations du 1er mai dans le monde entier ont fait de la solidarité avec la Palestine l’un de leurs principaux cris de ralliement. Dans certains endroits, des manifestants pro-palestiniens se sont joints aux protestations des travailleurs ; dans d’autres, les travailleurs et les syndicalistes ont eux-mêmes soulevé des revendications pro-palestiniennes. Dans plusieurs régions du monde, des travailleurs et des militants ont résisté à l’interdiction des drapeaux palestiniens par leur propre bureaucratie syndicale. La nouvelle et jeune génération de militants palestiniens est de plus en plus impliquée dans ces conflits et ces expériences politiques.

La construction d’un mouvement de solidarité enraciné dans la classe ouvrière est particulièrement importante en raison de la répression croissante de l’État et de la police contre le mouvement mondial de solidarité avec la Palestine, comme l’ont montré les campements d’étudiants aux États-Unis, en France, en Allemagne et aux Pays-Bas. Au milieu des attaques brutales de l’État, il y a d’intenses discussions sur les tactiques adéquates pour contrer cette répression. Les méthodes autonomes de militantisme et d’action clandestine séduisent de nombreuses personnes dans ces conditions, en particulier celles qui s’inspirent de la résistance armée de la guérilla palestinienne. En outre, les militants sont contraints de prendre position sur les questions de la lutte militaire par la diabolisation de la part des gouvernements et dans les médias de toute forme de résistance palestinienne. L’échange de missiles et de drones entre Israël et l’Iran, ainsi que le blocage par les Houthis de la navigation internationale en mer Rouge, ont déclenché un nouveau cycle de discussions sur ce que l’on appelle l’Axe de la Résistance.

Analyser les événements historiques et récents afin d’adopter une position éclairée sur les stratégies de libération de la Palestine est une nécessité pour les Palestiniens et pour le mouvement de solidarité à l’étranger. Comprendre les débats sur les rapports entre les actions armées et la mobilisation de masse dans le passé peut aider à clarifier les stratégies pour l’avenir. Comme indiqué ci-dessus, l’expérience des formations historiques de la gauche palestinienne démontre que les actions secrètes de quelques experts ne peuvent se substituer au pouvoir collectif d’une activité de masse et d’une solidarité de masse.

Les arguments autour des tactiques de guérilla sont loin d’être limités aux milieux militants. L’écologiste marxiste et auteur suédois Andreas Malm est connu pour prôner des stratégies d’action directe pour le mouvement climatique.42 En conséquence, dans une analyse récente de l’attaque génocidaire des Israéliens à Gaza, il a suggéré que les opérations de guérilla menées par le Hamas le 7 octobre étaient la plus grande réussite du mouvement palestinien jusqu’à présent, éclipsant la première Intifada.43 Bashir Abu-Manneh, qui enseigne la littérature palestinienne et israélienne, a répondu à Malm dans un article paru dans Jacobin, où il l’accuse à juste titre “d’ignorer que la première Intifada a été le plus grand mouvement de masse anticolonial auto-organisé de l’histoire palestinienne, et qu’elle a contraint Israël à faire des concessions politiques sans précédent”.44 La conception (non-armée) de la propagande par le fait de Malm est liée à celle (armée) des guérillas, car toutes les deux découlent d’un profond scepticisme quant au potentiel et au pouvoir de la classe ouvrière organisée.

Pourtant, Bashir Abu-Manneh ne propose guère plus d’alternative ; démoralisé par le carnage génocidaire à Gaza, il suggère que le mouvement de solidarité avec la Palestine traite la lutte comme une question de droit international qui ne fait aucune distinction entre l’oppresseur et l’opprimé, le colonisateur et le colonisé. Selon lui, la résistance armée du Hamas n’a apporté que destruction et défaite. D’un point de vue internationaliste, cet argument ne tient pas. La situation à Gaza est dévastatrice, mais les pratiques génocidaires d’Israël sont antérieures à octobre 2023. En 2018, les Nations Unies avaient déjà déclaré la bande de Gaza « invivable » en raison du siège israélien.45 Israël ne se contente pas de riposter à l’attaque du 7 octobre, mais l’utilise pour justifier sa volonté d’effacer Gaza. En 1992, le premier ministre Yitzhak Rabin a déclaré : « J’aimerais me réveiller un jour et constater que Gaza a sombré dans la mer ».46 De plus, l’intensité de l’assaut des forces israéliennes contre les civils palestiniens est loin d’être unique : entre juin et août 1982, plus de 17 000 personnes ont été tuées au Liban par Israël, soi-disant en « représailles » à la tentative d’assassinat de l’ambassadeur d’Israël à Londres.47

L’auteur palestinien Toufic Haddad explique qu’avant le 7 octobre, le mouvement national palestinien « se trouvait dans la position peu enviable de voir sa cause réduite à néant par les divisions internes et le carcan des accords d’Oslo », ce qui était aggravé par « les accords de normalisation arabes avec Israël et le fait que personne ne demandait vraiment des comptes à Israël ».48 Aujourd’hui, cependant, l’attaque israélienne dans le sillage du 7 octobre a déclenché un mouvement de solidarité mondial sans précédent, avec des manifestants en Jordanie, en Égypte et au Maroc qui sont entrés en conflit avec leurs régimes. Au-delà du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, les centres de l’alliance impérialiste occidentale, notamment les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne, ont également connu d’importantes mobilisations en faveur des Palestiniens.

Une dynamique similaire est apparue lors de la seconde Intifada, qui a éclaté en septembre 2000. Plutôt que de s’appuyer sur une organisation de masse à la base comme lors de la première Intifada, la seconde Intifada a été associée à des opérations militaires élitistes. Elle a néanmoins déclenché des actions de solidarité étudiante en Égypte, qui ont ensuite été considérées comme les premiers signes d’une organisation populaire menant à la révolution égyptienne de 2011, ébranlant l’un des piliers les plus solides du soutien à l’État israélien et à l’impérialisme parmi les régimes arabes.49

La résilience militaire de la résistance palestinienne est un facteur crucial de la situation actuelle. Les analystes militaires israéliens et une partie croissante de la population israélienne le reconnaissent aujourd’hui. Malgré des avantages écrasants en termes de puissance de feu et de technologie militaire, ainsi que le soutien enthousiaste des États les plus puissants de la planète, l’armée israélienne n’a pas réussi à « anéantir » le Hamas. Elle n’a pas non plus vaincu le mouvement palestinien. Au contraire, le Hamas a rétabli le contrôle politique dans des zones de Gaza censées avoir été conquises par les forces israéliennes il y a plusieurs mois, ce qui amène les responsables israéliens à envisager une « bataille prolongée » et à prédire que leurs forces ne parviendront pas à atteindre leurs objectifs militaires avant 2026 ou 2027.50

Même si nous nous opposons à une stratégie basée uniquement sur l’action militaire, nous ne pouvons pas nier le fait que la résistance armée a provoqué des ondes de choc dans les principaux Etats de l’impérialisme occidental. Cependant, l’expérience du passé montre que la lutte armée ne peut se substituer à l’internationalisme de la classe ouvrière et au pouvoir que les travailleurs détiennent entre leurs mains contre le système mondial du capitalisme et de l’impérialisme. Même si ce pouvoir est actuellement réprimé au Moyen-Orient, c’est certainement dans la région autour de la Palestine que les mobilisations des travailleurs ont le plus de chances de faire pencher la balance en faveur de la révolution contre l’État israélien, créant ainsi des possibilités de démantèlement permanent de la machine de guerre sioniste. Comme d’autres auteurs de ce journal l’ont affirmé depuis de nombreuses années, la classe ouvrière égyptienne en particulier a le potentiel d’approfondir massivement les crises causées par la lutte palestinienne à la fois pour l’État israélien et pour les États-Unis et leurs alliés occidentaux. Les travailleurs égyptiens ont le pouvoir de menacer la stabilité du régime militaire égyptien, qui est un canal clé de l’influence impérialiste dans la région.51 Au moment où nous écrivons ces lignes, la dictature du maréchal Abdel Fattah al-Sissi continue d’imposer le calme dans les rues et sur les lieux de travail d’Égypte, en utilisant les outils d’une répression brutale. Néanmoins, il reste hanté par l’expérience de la révolution égyptienne de 2011, qui avait un lien important et organique avec la lutte palestinienne et la solidarité de la masse du peuple égyptien avec la Palestine occupée.

La gauche palestinienne n’a jamais sérieusement essayé une stratégie organisationnelle cohérente pour développer l’auto-organisation et le pouvoir de la classe ouvrière, que ce soit dans la Palestine historique, dans la région au sens large ou dans la diaspora palestinienne. Les formations historiques de gauche n’ont pas réussi à rompre avec l’idée que les actions héroïques de la minorité armée, plutôt que l’auto-activité de millions de personnes, ouvriraient la voie à la libération nationale du peuple palestinien du colonialisme de peuplement.

Comme j’ai tenté de le démontrer à travers cette analyse historique de la montée et de la défaite de la gauche palestinienne, la crise rencontrée lors de la première Intifada était une crise de la direction. La direction des organisations de gauche palestiniennes s’appuyait sur des opérations armées élitistes et sur le soutien des États arabes. Pendant l’Intifada, il n’y avait pas de parti révolutionnaire ancré dans la classe ouvrière qui aurait pu offrir une alternative clairvoyante à la capitulation de l’OLP.

Le soutien inconditionnel à toute la résistance palestinienne doit s’accompagner d’un engagement sérieux dans les débats sur la manière dont la résistance peut être la plus efficace et comment elle peut finalement parvenir à la libération. Nous devons discuter des erreurs commises dans le passé et dialoguer sur les stratégies qui peuvent réussir. La nécessité d’une construction stratégique de partis révolutionnaires – en Palestine occupée et au-delà – capables de relever le défi du renversement du colonialisme sioniste augmente chaque jour qui passe, alors que le génocide contre le peuple palestinien se poursuit.

Ramsis Kilani est un socialiste révolutionnaire en Allemagne et membre du groupe Sozialismus von unten (Socialisme par en-bas).

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  1.   Merci à Anne Alexander d’avoir édité cet article et d’avoir fourni certaines références importantes.
    ↩︎
  2. « Hamas » est le mot arabe pour “zèle”, mais c’est aussi un acronyme pour le nom officiel du groupe, le Mouvement de résistance islamique (Harakat al-Muqawama al-Islamiya).
    ↩︎
  3.  La branche armée du Hamas porte le nom d’Izz ad-Din al-Qassam, prédicateur syrien et premier militant de l’opposition au sionisme. Il a formé la Main noire, un groupe de guérilla anti-britannique et anti-sioniste, en 1930. Al-Qassam a été assassiné par les autorités coloniales britanniques en 1935. Sa campagne armée a été un précurseur du soulèvement palestinien massif contre la domination britannique et la colonisation sioniste entre 1936 et 1939.
    ↩︎
  4.  Chaliand, 1971, p83.
    ↩︎
  5.  Comme l’a dit Tony Cliff dans un article écrit au lendemain de la guerre de 1967, « seules les personnes qui soutiennent sans réserve un peuple colonial en rébellion contre l’impérialisme sont fondées à critiquer sévèrement les politiques et les tactiques de leurs dirigeants »
    ↩︎
  6.  Voir Marshall, 1989, pp. 106-113.
    ↩︎
  7.  Voir https://player.vimeo.com/video/25917251?h=d811a692fa. Voir également Marshall, 1989, pp112-113 ; Sayigh, 1991, p609.
    ↩︎
  8.  Les Fedayin (qui signifient « ceux qui se sacrifient ») étaient les premiers combattants de la guérilla palestinienne.
    ↩︎
  9.  Fatah signifie « conquête », mais il s’agit également d’un acronyme inversé pour le nom officiel de l’organisation, le Mouvement de libération nationale de la Palestine (Harakat al-Tahrir al-Watani al-Filastini).
    ↩︎
  10.  « Watan » est le mot arabe pour “nation” ou “patrie”, et “wataniyya” (traduit par “nationalisme” ou “patriotisme”) est désormais associé à des formes de nationalisme basées sur les États-nations existant au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Elle s’oppose à la « qawmiyya », le nationalisme panarabe. Dans certains cas, les mouvements nationalistes watani ont explicitement rejeté la qawmiyya parce qu’elle propose une unité fondée sur l’identité arabe, certains nationalistes watani affirmant que cela exclut les groupes non arabes de leur projet de libération. Cette critique du nationalisme qawmi a été influente en Irak, où le mouvement kurde était également engagé dans des luttes de libération.
    ↩︎
  11.  Buck, 2013, p4.
    ↩︎
  12.  Omar, 2002.
    ↩︎
  13.  Voir l’article de Maher Charif, « Le Front démocratique pour la libération de la Palestine : 1969 to Present », sur Interactive Encyclopaedia of the Palestine Question- www.palquest.org/en/highlight/23611/democratic-front-liberation-palestine-%E2%80%93-dflp
    ↩︎
  14.  Cette interview a été publiée dans une série de documentaires en langue arabe d’Al Jazeera, intitulée The Tale of a Revolution, diffusée en 2008. L’épisode, intitulé « Au pays des cèdres », est disponible en ligne à l’adresse suivante : www.dailymotion.com/video/xq98wp. Le commandement général du FPLP est né d’une scission du FPLP en 1968. Il est principalement basé en Syrie.
    ↩︎
  15.  Salibi, 1988, p233.
    ↩︎
  16.  Harman, 2006.
    ↩︎
  17.  Harman, 1970.
    ↩︎
  18.  Bergman, 2016.
    ↩︎
  19.  Khaled, 1973, p64.
    ↩︎
  20.  Front populaire de libération de la Palestine, 1969, p. 31 ; Khaled 1973, p. 27. Le Front national de libération du Viêt Nam avait lancé l’offensive décisive du Têt en 1968.
    ↩︎
  21.  Voir A conversation between the sword and the neck  – Ghassan Kanafani
    ↩︎
  22.  Voir Cliff, 2000 ; Greenstein, 2011. Nicola était un militant trotskiste palestinien de Haïfa. Il était à l’origine l’un des principaux membres du Parti communiste palestinien, mais il l’a quitté lorsque le groupe s’est scindé en deux parties, l’une juive et l’autre palestinienne, en 1939. Il a ensuite rejoint Ygael Gluckstein (plus tard connu sous le nom de Tony Cliff) dans une petite organisation trotskiste dans les années 1940. Après le départ de Gluckstein pour Londres (où il a fondé le Socialist Review Group, prédécesseur du Socialist Workers Party) et dans le sillage de la Nakba, Nicola s’est imposé comme un intellectuel palestinien socialiste de premier plan. Il a joué un rôle important dans le développement politique du Matzpen (« Boussole »), une organisation socialiste israélienne, qu’il a rejointe en 1963. Il a été assigné à résidence après la guerre des Six Jours avant de s’installer à Londres en 1970.
    ↩︎
  23.  Nicola, 1972.
    ↩︎
  24.  Front populaire de libération de la Palestine, 1967, p. 17.
    ↩︎
  25.  Au cours des années 1970, l’OLP a pu développer une infrastructure relativement importante qui a servi à la fois à fournir des services essentiels aux Palestiniens dans les camps de réfugiés et à soutenir son projet politique. Les États arabes ont apporté des fonds à l’OLP, permettant ainsi le développement d’un « État sans territoire ». Voir Marshall, 1989, p. 130.
    ↩︎
  26.  Leopardi 2017, pp192-193.
    ↩︎
  27.  Eleftheriadou, 2021.
    ↩︎
  28.  Leopardi, 2017, p50.
    ↩︎
  29.  Hiltermann 1993, pp46-52.
    ↩︎
  30.  Intifada est le mot arabe qui signifie « soulèvement ». La première Intifada a éclaté en décembre 1987 à Gaza après un horrible incident au cours duquel un camion-citerne israélien a percuté des voitures transportant des travailleurs palestiniens et tué quatre passagers dans le camp de réfugiés de Jabalia. Les funérailles des morts se sont transformées en manifestations de masse contre l’occupation israélienne, déclenchant d’immenses mobilisations et des affrontements à travers Gaza et la Cisjordanie. Voir Marshall, 1989, p. 11.
    ↩︎
  31.  Mishal and Aharoni, 1994, p98.
    ↩︎
  32.  Marshall, 1989, p154-155.
    ↩︎
  33.  Voir https://player.vimeo.com/video/25917251?h=d811a692fa
    ↩︎
  34.  Centre palestinien de recherche sur les politiques et les enquêtes, 1995.
    ↩︎
  35.  Centre palestinien de recherche sur les politiques et les enquêtes, 2006.
    ↩︎
  36.  Centre palestinien de recherche sur les politiques et les enquêtes, 2023.
    ↩︎
  37. Video disponible ici Nizar Banat on Iranian support of Palestinian resistance
    ↩︎
  38.  Skare, 2023.
    ↩︎
  39.  Al Jazeera, 2017.
    ↩︎
  40.  Associated Press, 2024.
    ↩︎
  41.  See https://palestinianyouthmovement.com/about
    ↩︎
  42.  Malm, 2021.
    ↩︎
  43.  Malm, 2024
    ↩︎
  44.  Abu-Manneh, 2024.
    ↩︎
  45.  United Nations, 2018.
    ↩︎
  46.  Munayyer, 2023.
    ↩︎
  47.  Ross, 1982.
    ↩︎
  48.  Haddad, 2024.
    ↩︎
  49.  La deuxième intifada s’est achevée en 2005 et a abouti au démantèlement des colonies israéliennes à Gaza et au retrait de l’armée israélienne du territoire. La majeure partie de l’Intifada a été marquée par des campagnes d’attentats et de bombardements organisées par les groupes militants.
    ↩︎
  50.  Zitun, 2024.
    ↩︎
  51.  Alexander, 2024.
    ↩︎
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