Face à l’extrême droite et à la crise politique du gouvernement, l’unité antiraciste et antifasciste !

Éditorial

La séquence politique nous rappelle deux choses : le régime de Macron est un tremplin pour l’extrême droite, et la stratégie du NFP pour faire face au danger fasciste et à l’autoritarisme de Macron est un échec.

Les Cahiers d’A2C #14 – Octobre 2024

Le nouveau front populaire face à l’extrême droite, retour sur un échec. 

La nomination de Michel Barnier comme Premier ministre a été un choc pour de nombreux électeurs du NFP, vécue comme un déni de démocratie insupportable et entraînant des manifestations avec plus de 300 000 personnes à travers la France.

Cette nomination correspond à la volonté de Macron d’établir un bloc parlementaire qui lui permette de poursuivre ses politiques antisociales et nationalistes. Elle est malheureusement la suite logique de ce qu’il s’est construit politiquement pendant les élections législatives.

Du côté de la classe dirigeante, l’obsession est de barrer la route à tout ce qui pourrait renforcer la confiance de notre classe. Quitte à assumer préférer le RN au NFP, comme a pu le faire publiquement le Président du MEDEF.

Face au danger de voir les fascistes obtenir une majorité, la gauche et une partie de l’extrême gauche ont fait dominer l’appel au vote du NFP. Cela a non seulement propagé l’idée que la lutte contre l’extrême droite se jouait au niveau électoral, nous désarmant de nos capacités d’interventions dans les rues, dans nos quartiers et nos lieux de travail. Mais cela a aussi contribué à resolidifier le front républicain en se désistant dans certaines circonscriptions comme face à Darmanin qui a pourtant signé la victoire idéologique du RN avec le passage de la loi immigration. Dans ce renforcement d’un front républicain, il n’est pas étonnant que le choix du premier ministre penche vers une personnalité capable de continuer à défendre la politique réactionnaire et antisociale du gouvernement tout en actant un travail conjoint avec l’extrême droite. Cette dernière pourra profiter de cette nomination pour gagner de nouvelles victoires idéologiques. 

Rien est perdu, la Grande-Bretagne nous montre la voie. 

L’unité électorale doit être transformée par une unité d’action antifasciste et antiraciste dans nos quartiers, sur nos lieux de travail pour combattre l’extrême droite et ses idées. En ce sens, les évènements en Grande-Bretagne de cet été nous montrent la voie.

Pendant l’été, suite à la récupération raciste d’un triple meurtre commis à SouthPort, des émeutes racistes ont éclaté dans plusieurs villes.

Les attaques racistes à l’appel de groupes fascistes ont visé des mosquées, des centres d’hébergements d’urgence d’accueil de demandeur.euses d’asile ou encore des individus racisés isolés. Face à la violence des émeutes, les habitants.es ont réagi d’abord par eux mêmes en défendant les commerces et les lieux de prières dans les quartiers populaires. Très vite il a été organisé des ripostes de masse antiracistes. 

Dans ces ripostes, le front « Stand Up To Racism » a permis de donner la confiance d’organiser et de porter ces rassemblements. Face à la violence des attaques, les appels à rassemblements ont été massivement rejoints et les fascistes ont été isolés. Dans les rues, les manifestant.e.s chantaient face aux fascistes «Nous sommes beaucoup, vous êtes peu ». 

Cette mobilisation antiraciste et antifasciste a montré qu’il est possible d’endiguer la mise en action des fascistes dans les rues à partir d’une réaction spontanée des habitant.e.s et l’implantation de militant.e.s antiracistes et antiracistes à l’aide d’un front coordonné « Stand Up To Racism ». Face au fascisme, l’unité d’action doit rassembler toutes les forces politiques désirant s’opposer aux fascistes, et dont la priorité est d’exister dans la rue, là où les fascistes peuvent s’organiser. 

Du front électoral au front d’action…

A l’inverse de ce qui a été construit pendant les élections législatives, nous pensons que nous ne nous opposerons pas au RN et au projet fasciste par une coalition électorale. Les solutions politiques face au RN seront uniquement celles portées par l’organisation de la plupart d’entre nous à travers des actions concrètes visant à empêcher la construction d’un mouvement fasciste. 

Nous devons empêcher la progression de l’activité des militants fascistes et construire l’unité antiraciste pour faire face aux attaques réactionnaires mais aussi aux attaques antisociales que préparent le gouvernement. L’unité d’action dans la lutte antifasciste est plus que nécessaire pour rassembler le maximum de forces contre le développement des forces fascistes. Cette unité d’action doit regrouper toutes les forces politiques désirant s’opposer aux fascistes.

Ce front antiraciste et antifasciste doit se concrétiser autour de ripostes claires là où les organisations d’extrême droite prévoient des évènements politiques, mais aussi à travers la construction de cadres de veille et de défense par quartier et par lieu de travail ouverts à tous.tes afin de riposter face  aux attaques racistes et d’empêcher d’un même geste la présence de militants fascistes dans nos quartiers. 

…pour un antifascisme de classe

Face à la montée de l’extrême droite mais aussi face au renforcement autoritaire du gouvernement Macron, nous devons construire un antifascisme de classe. 

Le nouveau gouvernement, véritable concrétisation du front républicain avec Bruno Retailleau au ministère de l’intérieur va être extrêmement à l’offensive sur les questions sociales et mener une politique ultra réactionnaire envers les minorités de genre, les sans papiers, les personnes étrangères, etc…

Malgré ce coup autoritaire, le camp de la majorité et ce nouveau gouvernement sont extrêmement fragiles. Les élu.e.s ne reposent sur aucune base sociale et suscitent une colère dans notre classe. Mais pour empêcher que cette colère ne soit récupérée par l’extrême droite, nous devons combattre les tendances racistes et réactionnaires dans notre classe et l’influence du Rassemblement National notamment dans les organisations ouvrières, soit les syndicats. 

Pourtant la date du 1er octobre telle qu’elle est est largement en deçà des enjeux de la période. Dans une période où la classe dirigeante est à l’offensive malgré sa fragilité, la proposition des directions syndicales est une date aux mots d’ordre uniquement sociaux et économiques. Nous devons nous saisir de cette date et construire l’unité à la base en liant les questions sociales aux questions politiques. La colère face à l’extrême droite et les coups de force de Macron articulée à la grève peut permettre à une véritable force politique d’émerger.

Nous devons construire à partir de nos implantations syndicales, sur nos lieux de travail, mais aussi dans nos collectifs féministes, antiracistes et antifascistes la nécessité de porter dans les dates de grèves nationales des mots d’ordre politiques, contre les politiques racistes, pour la Palestine, contre le RN, conditions nécessaires pour espérer gagner face au gouvernement et faire reculer l’extrême droite. En sachant qu’une large partie de notre classe subit de pleins fouets l’accélération réactionnaire et raciste, se tenir à leurs côtés et construire une solidarité antiraciste et antifasciste, c’est briser les divisions qui nous empêchent de renforcer l’antagonisme vers nos véritables ennemis : la classe dominante et l’extrême droite.

Anouk (Marseille)