Des manifestations massives défient l’extrême droite le 7 août : la peur a changé de camp

Mobilisation antiraciste en Grande Bretagne, publié sur le site du Socialist Worker Party

L’extrême-droite avait menacé d’attaquer des douzaines de lieux en lien avec des immigré.e.s et des demandeur.eu.ses d’asile mercredi 7 août, mais au lieux des pogromes annoncés, on a vu une explosion de mobilisation antiraciste, antifasciste et solidaire des migrant.e.s et des musulman.e.s.

A la plupart des cibles désignées par l’extrême droite, il n’y eût aucune présence raciste. A d’autres endroits, des dizaines de racistes se sont montrés mais sont tombés sur des centaines voire des milliers d’antiracistes déterminé.e.s à leur barrer la route.

Des dizaines de milliers d’antiracistes organisé.e.s par Stand Up To Racism (SUTR) ont rejeté les appels des politicien.ne.s et des flics à rester cloîtré chez soi. Iels ont fait ce qu’il fallait faire pour prendre le contrôle de leurs quartiers. Personne ne savait à l’avance s’il faudrait faire face à quelques nazis ou à une foule de racistes enragés. Mais la force du nombre du camp antiraciste a donné confiance à toutes et tous.

Aujourd’hui au moins, la peur a changé de camp. Les fascistes étaient terrifiés et les antiracistes, Musulman.e.s et socialistes avaient la confiance. Il y avait aussi une présence plus importante des organisations syndicales de la classe ouvrière qu’aux dernières mobilisations antiracistes.

À Bristol près de 7000 antifascistes ont rempli les rues et chanté “les réfugié.e.s sont les bienvenu.e.s ici” et “Free Palestine”. Il y avait une vraie présence syndicale, comme le dit Salena Williams qui a participé à la mobilisation : “C’est fantastique, absolument massif. Il y a des drapeaux des syndicats Unison, NEU, CWU et PCS. Le rendez-vous des fascistes est programmé dans une heure, mais s’ils viennent, il ne pourront même pas traverser la rue”.

Un nombre équivalent s’est mobilisé à Walthamstow, un quartier de l’est de Londres. La foule, où se cotoyaient jeunes racisé.e.s et non-racisé.e.s, a facilement franchi les barrières de la police pour prendre la rue principale. Les manifestant.e.s ont tenu la rue pendant des heures dans la détermination et la bonne humeur, chantant des slogans pro-migrants et contre l’extrême droite.

Corneil faisait partie d’une délégation de pompièr.e.s syndiqué.e.s au FBU (Fire Brigade Union). Il dit à Socialist Worker qu’il était “extrêmement important” que les syndicats prennent à bras le corps la lutte contre le racisme. “Nous essayons d’envoyer nos syndiqués à chaque endroit menacé par les fascistes ; j’apelle tous les membres des autres syndicats à faire la même chose.”

Fhoaib fait partie d’un groupe de gazièr.e.s qui sont venu.e.s manifester. Iels ont monté la garde sur les côtés. “ça m’énerve quand j’entends les racistes dire que les Musulman.e.s n’ont pas leur place en Grande-Bretagne. Ma famille est là depuis 35 ans, nous avons aidé à construire ce quartier. Nous faisons partie de la classe ouvrière et nous devrions avoir les mêmes droits que tous.te.s les autres.”

Jane, qui est cheminote, a manifesté avec ses camarades du syndicat RMT. Elle raconte que le syndicat était en congrès pour discuter des luttes salariales en journée et que tous.te.s les participant.e.s ont décidé de rejoindre une mobilisation antiraciste ce soir-là.

Comme beaucoup d’autres participant.e.s à la manifestation, Maya et Eloise qui vivent à Newham (près de Walthamstow) font facilement le lien entre la lutte pour la Palestine et la violence de l’extrême droite : “le racisme anti-Musulman a vraiment explosé pendant la guerre contre Gaza”.

Walstamstow est un quartier connu pour avoir humilié l’English Defence League (EDL, groupe néonazi) de Tommy Robinson en 2012. Les milliers d’antiracistes qui ont pris la rue mercredi (7 août) ont à nouveau démoralisé ces fascistes : pas un seul n’a osé se montrer malgré le rendez-vous annoncé.

A Finchley, quartier du nord de Londre, ce sont près de 3000 antiracistes qui se sont mobilisé.e.s. Les quelques fascistes qui sont venu.e.s au rendez-vous ont fini par se cacher.

Plus de 1500 antiracistes se sont mobilisé.e.s à Liverpool, selon Saira : “parmi les mobilisé.e.s se trouvaient des syndicalistes de l’UCU, Unison, FBU, Unite, RMT et PCS qui sont venu.e.s défendre l’Asylum Link Centre (un centre de demandeur.eus.e.s d’asile).”

“Des jeunes du quartier ont rejoint la mobilisation sous les acclamations, l’ambiance était électrique et nous étions en confiance. Un petit groupe d’extrême droite s’est rassemblé mais n’a pas pu sortir du parc où ils s’étaient donné rendez-vous.”

“Des petits groupes d’antiracistes se sont constitué pour faire le tour des mosquées du quartier et s’assurer qu’elles étaient bien protégé.e.s. Il faut qu’on prévoie la même chose pour la prochaine manifestation (NdT : le 10 août) à Pier Head.”

Tristan ajoute : “Ce qui distingue cette mobilisation est peut-être la participation des jeunes habitant.e.s Arabes du quartier, donc beaucoup m’ont dit que c’était leur première manifestation. Iels ont pris la tête de la manifestation et se sont rendu.e.s compte de leur pouvoir politique et du pouvoir de la mobilisation du quartier.”

A Oxford, selon Julie, “plus de 500 personnes au total dans le camp antiraciste. 150 près de la mosquée centrale, 300 devant les locaux de l’association Asylum Welcome et une cinquantaine à l’hôtel qui accueille des migrant.e.s. Des chauffeurs de taxi racisé.e.s déposent les manifestant.e.s gratuitement. Les fascistes n’ont pas osé se montrer, seuls quelques individus suspects ont été repérés.”

Selon Rob, “près de 3000 antiracistes ont pris la rue à Newcastle. C’est massif, beaucoup de racisé.e.s et de non-racisé.e.s. C’est un super évènement, la confiance est de notre côté. Pas un fascistes n’a osé se montrer.”

Tom de Sheffield raconte que “1500 antiracistes se sont mobilisé.e.s à Sheffield, dont une délégation de la mosquée locale qui a rejoint la mobilisation après la prière. Pas un fasciste en vue. Les slogans antiracistes sont hégémoniques.”

Près de 1000 antiracistes ont pris la rue à Birmingham.

À Rotherham, où quelques jours auparavant des fascistes avaient mis le feu à un hôtel où vivent des migrant.e.s, un grand nombre d’antiracistes se sont mobilisé.e.s. Les fascistes ne sont pas venus.

À Brighton, près de 2000 antifascistes ont encerclé quelques nazis. “L’ambiance est super ici, dit Christian. Nous avons chanté ‘rentrez chez vous, vous n’êtes que 5’ pour troller les fascistes.” Les pancartes des antifascistes lisaient “plus de place pour les immigré.e.s, pas pour la haine.”

Près de 500 antiracistes étaient mobilisé.e.s à Nottingham et des nombres comparables à Hastings. Pour Simon, “la manifestation de Hastings était en feu, on a chanté des slogans pendant deux heures avec quelques prises de parole. Je ne sais pas si l’extrême droite est venue, en tout cas ils ne sont pas restés longtemps. Les gens se sont mobilisé.e.s malgré le nouveau député Labour et l’élu local des Verts, qui ont demandé aux gens de rester chez eux. Ils avaient tort, nous avions raison.”

Dans la petite ville d’Aldershot, la cinquantaine de fascistes qui s’est rassemblées a été confrontée par plus de 150 antiracistes. Un manifestant a dit “Non seulement nous avons confronté ces voyous racistes mais aussi tous les appels à ne pas se mobiliser car ce serait trop dangereux.”

Il y avait à peu près 70 antiracistes à Bolton, et aucun fasciste. À Norwich, une mobilisation appelée à la dernière minute a vu 100 antiraciste faire face à une douzaine de fascistes.

Sue a Derby dit : “Nous étions plus de 500 du côté des antiracistes, racisées et non-racisées, et pas de fachos en vue. La rue est à qui ? A nous, sans aucun doute. Les gens sont inquièt.e.s de la menace fasciste, mais la taille de la mobilisation de notre camp est rassurante et nous donne confiance pour la suite.”

500 antiracistes se sont mobilisé.e.s à Hackney, quartier est de Londres, en quelques heures, après une menace fasciste contre une mosquée locale. Mais les fascistes ne sont jamais venus, et ils ont bien fait car ils auraient été repoussés par une foule déterminée.

Aisling, qui a participé à la manifestation, dit “nous devons faire front à gauche, nous devons être uni.e.s. Aujourd’hui était vraiment prometteur, mais il faut continuer et nous renforcer.”

A Lewisham, quartier sud de Londres, un antiraciste nous dit que “nous étions au moins 500 antiracistes. A part quelques blancs qui boudaient, nous n’avons repéré aucun fasciste. Il y avait des pancartes de la bourse du travail de Lewisham et de la section locale de SUTR. Un esprit de résistance et de solidarité nous rassemblait.”

Harold Wilson, membre de la section SUTR Londres sud-est, raconte “je me souviens de 1977 et de l’ascension terrifiante des nazis dans les quartiers sud-est de Londres, mais aussi que nous avons fini par casser leur dynamique. Aujourd’hui doit être le début d’une grande bataille pour faire définitivement reculer l’extrême droite.”

Parmi les intervenant.e.s figurait l’imam de la mosquée locale qui a dénoncé les mensonges toxiques de l’extrême droite à propos des musulman.e.s et le rôle pourri de leur porte-parole au parlement, Nigel Farage.

Ben du syndicat RMT (cheminot.e.s) a lu un message de solidarité : “chaque membre de notre syndicat a reçu des instructions pour aller dans la rue et apporter la solidarité à la mosquée de son quartier. Nous devons virer ces bâtards de racistes.”

Ben a aussi dénoncé la complicité de l’Etat britannique dans le “génocide à Gaza”.

Les élu.e.s locaux du Labour étaient honteusement absent.e.s.

Francesca dit “nous devons amener ce message d’amour et de solidarité dans nos lieux de travail et nos quartiers pour construire ce mouvement.”

500 antiracistes se sont rassemblé.e.s à Cheadle contre zéro nazis. David James raconte que “des centaines d’antifascistes ont défilé dans un quartier industriel. Les fascistes n’ont pas osé se montrer près du cabinet d’avocat.e.s pro-migrant.e.s qu’ils avaient menacé.” Des prises de paroles de militant.e.s syndical.e.s, d’un ancien migrant et de militant.e.s antiracistes ont été chaudement applaudies, ainsi que des lectures de poèmes de Michael Rosen et Percy Shelley.

La police a arrêté un antifasciste qu’elle a accusé de “repérage”, mais les flics ont finalement été forcés de le relacher quand les manifestant.e.s ont entouré la voiture de police dans laquelle il a été mis et bloqué les routes environnantes.

Selon Dave, “grosse mobilisation à Bedford, près de 500 antiraciste et l’extrême droite n’est pas apparue.”

A Brentford, quartier ouest de Londres, il y avait 400 antifascistes contre une poignée de fascistes. La foule a chanté “On est beaucoup beaucoup plus nombreux que vous” au groupe de fascistes démoralisés. Jonathan, militant antiraciste, dit à Socialist Worker “Il y a une belle énergie. Les gens ont fait leurs propres pancartes avec des messages comme ‘Nazis hors de nos rues’ et ‘Safe space, no hate space’. On sent vraiment que le quartier s’est mobilisé, au-delà des militant.e.s.”

Balwinder Rana, fondateur du groupe “Sikhs contre l’EDL”, dit : “Nous essayons de montrer l’exemple, car les fascistes n’en sont qu’au début. Ce n’est pas la fin de l’histoire. Il faut continuer et persévérer jusqu’à ce qu’on les batte. Nous allons défendre nos frères et soeurs musulman.e.s et les migrant.e.s jusqu’au bout, et toutes celles et ceux que les fascistes attaquent.”

“On a battu le National Front dans les années 70, on a battu le BNP dans les années 90 et on a battu l’EDL. Et maintenant, nous allons battre les fascistes.”

Sarah de l’ouest de Londres rapporte qu’il n’y a “aucun signe des fascistes ce soir, mais 400 antiracistes devant la bibliothèque de North Harrow. L’ambiance est à l’unité. Je pense que certain.e.s se souviennent de la fois où nous avions défendu la mosquée locale en 2009 contre les fascistes, nous étions 3000 personnes dans la rue. Ce soir, beaucoup de personnes mobilisées viennent du mouvement Palestine local. La dernière fois que les fascistes ont essayé, ils étaient 11. Harrow est vraiment une cible stupide pour les fascistes.”

Mark à Chatham faisait partie de la cinquantaine d’antiracistes qui se sont mobilisé.e.s devant un cabinet d’avocats spécialisé dans le droit d’asile qui était visé par l’extrême droite : “Nos nombres ne sont pas ridicules, mais l’extrême droite est deux fois plus nombreuse que nous ce soir. Nous tenons bon pour dire non à la division et à la haine. Oui à l’unité et à la solidarité.”

Selon Tim, “près de 500 personnes se sont mobilisées pour défendre un avocat du droit d’asile à Westcliff-on-Sea, Southend. Les rues autour du cabinet étaient occupées par les antiracistes. Quelques dizaines de fascistes sont venues mais n’ont pas du tout réussi à s’approcher de leur cible. Nous ne savions pas à quoi nous attendre mais notre rassemblement était jeune, plein d’énergie et de confiance pour défendre le quartier. Les gens étaient fier.e.s du résultat.”

Mercredi 7 août était un jour de riposte brillante contre l’extrême droite. Mais tout le monde sait que la menace n’a pas disparu et que ce succès doit servir de marchepieds pour un mouvement Stand Up To Racism plus fort et mieux ancré localement. Il faut virer les fascistes des rues et extirper le racisme.L’extrême droite espère que la mobilisation antiraciste va s’estomper et qu’ils pourront reprendre la rue. Il faut briser cet espoir. 

Article traduit de l’anglais, publié sur le site Socialist Worker : https://socialistworker.co.uk/anti-racism/7-august-fear-changes-sides-as-massive-protests-defy-the-far-right/