Le mardi 27 juin au matin, un policier a assassiné de sang froid Nahel, un jeune homme de 17 ans, pour un défaut de permis. Ce terrible événement n’a malheureusement rien d’exceptionnel dans un État policier raciste. En France, le rythme de ces exécutions s’est accéléré depuis l’article de loi Cazeneuve de 2017 qui élargit la légitime défense jusqu’au port d’armes et constitue un réel permis de tuer. Depuis 2022, il y a eu 14 meurtres suite à des refus d’obtempérer, 14 vies volées dans l’indifférence la plus totale de la majeure partie de la classe politique de droite comme de gauche, parce qu’ils étaient noirs et arabes. La police tue. Mais cette fois, il est impossible de détourner le regard. La colère explose et la France est en feu. Depuis 7 jours, la jeunesse des quartiers populaires se soulève à Paris, Lyon, Cayenne, Rennes, Marseille, Montpellier, Toulouse…
Ce mouvement arrive après 5 mois de lutte intense contre la réforme des retraites et plus généralement pour la hausse des salaires face à l’inflation et contre Macron. Cette séquence de lutte a mis une large partie de notre classe en mouvement. Nous avons discuté sur les piquets de grève, en assemblées, en manifestations. Face à nos patrons, au gouvernement et à la répression, nous avons fait classe. Dans les manifestations contre la réforme des retraites étaient présent·es des cortèges de sans-papiers, attaqué·es par la Loi immigration dite loi Darmanin. Étaient présent·es les travailleur·euses des quartiers populaires qui avaient passé le confinement au travail pendant que la bourgeoisie se protégeait dans des résidences secondaires. La loi Darmanin et la réforme des retraites sont sorties au même moment et nous avons argumenté partout où il était possible de le faire dans le mouvement pour une solidarité de classe antiraciste. Ne pas se positionner clairement contre cette attaque, c’est laisser la possibilité au gouvernement de nous diviser à travers le racisme et aux fascistes de gangrener le mouvement. Aucune complaisance pour le racisme et les violences policières, en France ou aux frontières. Aujourd’hui, alors que le gouvernement Macron aux abois annonçait 100 jours d’apaisement, il est réduit à instaurer des couvre-feux et à envoyer le GIGN, la BRI, le RAID comme rempart de son pouvoir car depuis 6 jours la jeunesse des quartiers populaires se soulève contre le racisme. Elle se sert dans les magasins, reprend ce qui lui est dû, elle brûle les symboles de l’État raciste.
Les habitant·es des quartiers populaires n’ont pas attendu le mouvement des retraites pour faire tomber le mythe de la police. Une génération après Zyed et Bouna, la mémoire du mouvement Black lives matter et des manifestations pour Adama reste fraîche. C’est bien la colère face au racisme meurtrier qui s’exprime ici. Mais l’état de crise dans lequel le mouvement contre la réforme des retraites a mis Macron ouvre la possibilité d’une victoire. Là où le gouvernement fera tout pour isoler ce mouvement antiraciste et toute possibilité de pont avec la lutte contre la réforme des retraites, nous devons construire ce lien. Dans tous les cadres d’auto-organisation construits contre la réforme des retraites nous devons exprimer une solidarité à la base, claire et inconditionnelle à celles et ceux qui luttent dans la rue pour Nahel. La direction du mouvement est portée par celles et ceux qui subissent de plein fouet les violences racistes, qu’elles soient policières, administratives, ou économiques et se soulèvent depuis maintenant 6 jours. Soutenir activement les révolté·es pour Nahel n’est pas simplement un geste de solidarité morale. Il est vital de le faire car c’est toute notre classe qui est attaquée quand la même police qui brutalisait les grévistes pour les faire retourner au travail assassine un enfant, quand l’État envoie la BRI sur quelqu’un qui s’est servi dans un magasin, quand il interdit toute forme de rassemblement.
Si nous ne faisons pas le pont entre ces deux séquences, qui le fera ?
Le fascisme s’appuie sur la misère créée par les capitalistes, oui, mais croire qu’il suffit de lutter contre les capitalistes et de renforcer notre classe uniquement sur des bases économiques pour éloigner le danger fasciste est une illusion. Il n’y a rien de mécanique entre la mise en mouvement de notre classe contre l’exploitation et la suppression du danger fasciste. Un sondage réalisé en plein mouvement contre la réforme des retraites place Marine Le Pen en tête au premier tour en 2027. Aujourd’hui, le danger fasciste est extrêmement alarmant. Au-delà de l’adhésion passive que reflète ce sondage, une adhésion active au fascisme s’enclenche dans la rue. Dans leur communiqué, le syndicat de police d’extrême droite Alliance appelle au sang, parle de “guerre” et de “horde de sauvages”, l’extrême droite lance une cagnotte de soutien au policier assassin, à Lyon et Chambéry des fascistes sortent avec confiance dans la rue, à Lorient ils se font les auxiliaires de la police.
Les fascistes sont à l’offensive et il faut choisir notre camp. Partout où il est possible de le faire, multiplions les marques de solidarité à tous·tes les insurgé·es pour construire un mouvement de masse contre le racisme et le danger fasciste. Macron veut mettre notre classe au pas, une partie de celle-ci se soulève. Rejoignons-la.